Le futur grenier agricole du monde

A la colonie de Witmarsum, un petit vent de Bavière souffle dans l'air chaud et tropical de ce coin de l'Etat du Parana, au sud-est du Brésil. Gerhold Schartner y est ingénieur agronome. Ses grands-parents, des Allemands de la Volga, s'y sont installés à la fin des années 20. "Ils ont participé à la première vague de développement de l'agrobusiness au Brésil, celle que des pionniers européens ont lancée à la fin du XIXe siècle dans les Etats du sud du Brésil où le climat, plus tempéré, est proche de celui de l'Europe. Mais aujourd'hui, nos exploitations sont trop petites. L'avenir de l'agrobusiness, c'est le Mato Grosso et d'autres régions plus au nord encore, où les exploitations sont immenses", explique-t-il. Depuis l'origine, le Brésil, dont la superficie représente seize fois la France, est une puissance agricole dotée d'immenses surfaces cultivables. Il a vécu selon des cycles - la canne à sucre, le café, le caoutchouc - où des monocultures assuraient sa prospérité puis sa déchéance lorsque les cours s'effondraient.Pour Marco Jank, directeur du centre Icône à Sao Paulo, cette époque est révolue. "Le Brésil a profondément diversifié sa production agricole : il est le premier producteur mondial de café, de sucre et de jus d'orange, le deuxième de cacao et de soja. Ses cheptels bovin et porcin sont immenses ; il est le premier exportateur mondial de volailles, il produit aussi du maïs, du tabac. La production d'éthanol, à partir de la canne à sucre et dont on peut faire du carburant bio, explose actuellement avec la flambée des prix du pétrole...", égrène-t-il inlassablement.Depuis l'abolition des subventions agricoles et la réduction drastique des droits de douane dans les années 90 et à cause de la concurrence que se livrent le Brésil et l'Argentine dans le cadre du Mercosur, l'agriculture brésilienne est devenue hypercompétitive. Le Brésil se situe désormais au troisième ou quatrième rang mondial des producteurs agricoles et il ambitionne de devenir le numéro un mondial avant la fin de la décennie. Le poids de l'agrobusiness dans l'économie brésilienne est immense : il constitue 30 % du PIB, 45 % des exportations et 35 % de l'emploi."Nos avantages comparatifs sont immenses, affirme Marcos Jank. Grâce au climat, les agriculteurs brésiliens peuvent réaliser deux récoltes par an. Et les recherches que nous avons lancées dès les années 50 portent désormais leur fruit." Les agronomes brésiliens ont notamment mis au point des techniques pour lutter contre l'acidité des sols du centre du pays.infrastructures. Depuis, c'est la ruée vers l'ouest, notamment vers le Mato Grosso, où le soja est cultivé, et vers le nord, à l'instar de l'Etat de Bahia. C'est la nouvelle frontière de l'agriculture brésilienne. Aux coopératives du sud du pays, comme celle de Witmarsum, ont succédé d'immenses exploitations de plusieurs milliers d'hectares comparables à celles du Middle West américain.Le lobby de l'agrobusiness est puissant : il a permis il y a quelques semaines l'adoption par le Congrès d'une loi libéralisant l'utilisation des OGM. Le Brésil souffre toutefois d'un manque d'infrastructures pour exporter son immense production. Les capacités de stockage sont trop faibles et le réseau de routes, de voies ferrées et surtout de ports de grande capacité est encore largement insuffisant.Olivier Guez, à Sao Paulo et dans l'Etat du Paraná
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