Les fusions entre chambres de commerce vont s'accélérer

Désormais, elles n'ont plus tellement le choix. Incitées depuis des années à s'unir pour rationaliser leur maillage, les chambres de commerce et d'industrie (CCI) françaises voient actuellement poindre la menace de mariages forcés par décret. Lassé d'attendre, l'État a fixé la semaine dernière par décret, en application de la loi du 2 août 2005, des seuils minimaux d'existence (base fiscale, nombre d'inscrits), qui condamnent à l'union une trentaine de petites CCI. Pour rester indépendante, une CCI doit, sauf exception, compter au moins 4.500 ressortissants ou disposer d'une base d'imposition supérieure à 350 millions d'euros.Ces fiançailles le pistolet sur la tempe ne séduisent guère l'Assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie (ACFCI). "Nous sommes totalement opposés à des fusions imposées", dit son président, Jean-François Bernardin, sans nier pour autant que la carte consulaire a besoin d'évoluer. Car les incongruités sont légion. Le Finistère compte trois chambres, la Seine-Maritime en a sept, l'Aquitaine, huit, le Nord Pas-de-Calais, treize ! Total national : cent cinquante chambres, plus vingt chambres régionales. "Mais nous avions cent cinquante-neuf CCI il y a deux ans, tempère Jean-François Bernardin. Les fusions avancent. Huit sont en cours et de quinze à vingt devraient se décider rapidement." Ces dernières années, les chambres de Haute-Saône se sont unies, tout comme celles de Meaux et Melun (Seine-et-Marne), et celles de Saint-Dié et Épinal (Vosges). Les raisons d'une inertie. Politiquement, le mariage est complexe. Des élus consulaires doivent s'effacer ; les maires concernés rechignent à perdre leurs chambres. Sur le plan technique, l'harmonisation de l'impôt additionnel à la taxe professionnelle (IATP) ne va pas de soi. La principale ressource des chambres connaît des variations non négligeables, et les entreprises acceptent difficilement qu'une union censée les servir se traduise par un hausse du taux de l'IATP. Le choix du partenaire n'est pas non plus évident. La logique administrative soudait la CCI d'Abbeville à celle d'Amiens (Somme). Mais Abbeville partage avec Le Tréport (Seine-Maritime) le gros bassin industriel de la Bresle (leur fusion sera achevée cette année). De même, les deux CCI de l'Ardèche pourraient regarder chacune vers la vallée du Rhône plutôt que de s'allier entre elles. A priori, pas question de suppressions d'emplois en cas de fusion. "À effectif constant, l'idée était de trouver des synergies sur le travail administratif afin de dégager des moyens pour les services aux entreprises", explique Sylvain Jacobée, directeur général de la CCI des Vosges. La remarque est tout sauf anodine. Car derrière la question des rapprochements, c'est bel et bien celle de l'efficacité des CCI qui est posée. "Les chambres d'agriculture sont nombreuses, note le directeur général des services d'un conseil général de l'Ouest. Si personne ne parle de les forcer à se regrouper, c'est parce qu'elles font du bon travail. Je n'en dirais pas autant des CCI de mon département."Un site Internet unique. Jean-François Bernardin n'esquive pas la charge. "Nous coûtons de l'argent. Sommes-nous toujours utiles aux entreprises ? Il est de notre devoir d'y réfléchir et d'évoluer en conséquence." Les pistes ne manquent pas. Le réseau des CCI est par exemple en train de mettre sur un site unique la totalité de ses aides à l'export, et de rationaliser ses missions commerciales à l'étranger. Sous réserve de tarifs adaptés, des entreprises de Tours ou de Vesoul pourront peut-être bientôt partir en prospection avec la CCI de Brest ou d'Orléans, ce qui n'était pas envisageable jusqu'à présent. Réformette ? Peut-être, mais pour des dames âgées et respectables, chaque pas compte.Erwan Seznec
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