Le projet du Trésor britannique de taxer les étrangers affole la City

C'est l'ancien chef du patronat britannique, Digby Jones, qui a jeté le pavé dans la mare. En critiquant, dans le Financial Times, le projet du Trésor britannique de durcir la fiscalité vis-à-vis des étrangers résidents, mais non domiciliés au Royaume-Uni, il a fait éclater au grand jour un débat qui couvait depuis longtemps parmi les communautés d'expatriés.La réforme de la taxation des étrangers est une idée du chancelier de l'Échiquier, Alistair Darling. Constatant que nombre de ressortissants de pays tiers vivent au Royaume-Uni sans déclarer les revenus qu'ils gagnent dans leur pays d'origine ou dans des centres offshore, il a décidé de mettre fin à cette exemption unique parmi les pays du G7, qui date des temps de l'empire britannique. En octobre, le chancelier a donc lancé une consultation qui s'achèvera le 28 février, proposant que les étrangers résidents, mais non domiciliés au Royaume-Uni (c'est-à-dire qui n'élisent pas ce pays comme base unique pour leur statut fiscal) soient désormais soumis à une fiscalité accrue. " Chaque résident doit contribuer à hauteur de ses moyens aux dépenses courantes de ce pays ", a expliqué le chancelier, qui doit présenter ses conclusions le 12 mars, jour du budget, en vue d'introduire le nouveau régime en avril. Le Trésor estime à 116.000 le nombre de résidents " non dom " bénéficiant de l'exemption fiscale. Alistair Darling leur demande soit de déclarer leur revenu global, qui deviendrait ainsi imposable outre-Manche, soit de payer un forfait annuel de 30.000 livres (40.000 euros) en guise de bouclier fiscal.APPUI DES SYNDICATS ET DES CONSERVATEURSLe chancelier a laissé comprendre que le nouveau régime affecterait surtout les personnes très riches (les Lakshmi-Mittal, Roman Abramowitch ou les gros financiers de la City). À cet égard, s'il est accusé de modération par certaines ONG (lire ci-dessous), il a au moins l'appui des syndicats et celui, tacite, des conservateurs, dont il a d'ailleurs copié l'idée. Mais Alistair Darling n'a probablement pas prévu le tollé des communautés d'expatriés et de la City de Londres, dont la prospérité dépend en partie des " non-dom ".Ex-patron des patrons et, depuis juillet 2007, ministre chargé de la promotion du " made in UK " dans le cabinet de Gordon Brown, Digby Jones a affirmé que cette réforme avait de quoi " pénaliser l'attractivité de Londres comme place financière internationale ", dans la mesure où elle risque de décourager les talents étrangers de venir s'établir à la City. La chambre de commerce allemande en Grande-Bretagne a d'ailleurs écrit au chancelier, en expliquant que ses membres pourraient décider de déplacer leurs effectifs dans des pays à taxation comparable, mais avec des coûts de la vie inférieurs. Hier, le directeur mondial de la firme de Private Equity Apax Partners, Adrian Beecroft, a évoqué lui aussi la possibilité de délocalisation, notamment vers la Suisse. L'ambassade des États-Unis a dénoncé de son côté le risque que la taxe ne soit pas déductible des impôts que tout Américain paie chez lui, et qu'elle soit donc contraire à la loi contre la double imposition.Fisc ou qualité de vie ?5 h 30 : les premiers analystes arrivent à leur bureau londonien. Entre conference calls, sandwichs au concombre et notes à rédiger, la journée se poursuivra... jusqu'à minuit parfois. Autant dire que, non domiciliés profitant d'avantages fiscaux ou non, la vie des professionnels de la finance n'est pas de tout repos à Londres. Du coup, nombreux sont ceux qui y font leurs classes et, souvent après avoir été licenciés sans ménagement du jour au lendemain, choisissent, au final, de revenir à Paris. Tel cet analyste, qui déclare : " Je préfère gagner moins, payer plus d'impôts, mais voir ma famille "...
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