Medvedev, un Poutine à l'allure libérale au Kremlin

Qui est cet homme que les Russes doivent " élire " dimanche ? Un remplaçant servile et passager d'un Vladimir Poutine populaire mais contraint par la Constitution de se retirer après deux mandats ? Ou bien un juriste sincèrement libéral, déterminé à faire de la Russie un État de droit ? Il est " vendu " aux Russes sous la première identité, aux médias étrangers sous la seconde.Bien que Dmitri Medvedev ait fait toute sa carrière solidement arrimé à la roquette Poutine, il s'en distingue par quelques traits fondamentaux. Le dauphin n'a jamais travaillé pour le KBG (ni pour son successeur le FSB). tout juste 42 ans, il est le premier chef d'État russe à n'avoir pas fait carrière du temps de l'URSS. C'est donc un homme neuf, bien qu'il appartienne totalement au sérail. Ses discours, encore très formatés par sa formation de juriste, sont monotones. Il ne prononce jamais un mot plus haut que l'autre tandis que Vladimir Poutine aime utiliser des expressions colorées empruntées au jargon des prisons. De très modeste carrure et ne mesurant qu'un mètre soixante-deux, Dmitri Medvedev contraste par rapport à un président ceinture noire de judo passant pour être très sportif. Les Russes aiment être gouvernés par des hommes forts. Medvedev n'en a que le nom (qui signifie " ours " en russe).Avec Vladimir Poutine, il a en commun d'être originaire de Saint-Pétersbourg. Les deux hommes ont fait leurs études dans la même université de droit. Son doyen, Nikolaï Kropatchev, dit très bien se souvenir de Medvedev : " Ce qui est frappant chez lui comme d'ailleurs chez Poutine, c'est que ce sont des gens qui respectent fondamentalement la loi. Poutine a refusé un troisième mandat alors que tout le monde, y compris la population, le poussait à rester, jubile Nikolaï Kropatchev, qui est resté proche de son ancien élève. Pour eux, la loi est plus importante que tout. "Les deux hommes sont entrés en politique ensemble, après avoir été remarqués par leur ancien professeur de droit, Anatoli Sobtchak, devenu en 1991 maire de Saint-Pétersbourg. Très jeune mais réputé brillant juriste, Dmitri Medvedev travaille au service de Vladimir Poutine en tant que consultant sur des projets d'investissements. Il aurait à deux reprises sorti d'affaire son aîné englué dans des scandales, ce qui explique les renvois d'ascenseur ultérieurs. Parallèlement, Dmitri Medvedev tâte à partir de 1993 au grand business en tant que directeur des affaires juridiques d'Ilim Pulp, numéro un russe de la sylviculture et du papier. Il finit même par prendre le poste de président du conseil d'administration de sa principale filiale.Après la nomination surprise de Vladimir Poutine comme Premier ministre en 1999, Dmitri Medvedev est appelé à Moscou au sein de l'administration présidentielle, sorte de gouvernement de l'ombre extrêmement influent. Une administration dont il prend la direction de 2003 à novembre 2005. Nommé dès 2000 président du conseil de direction de Gazprom, il est chargé de ramener le numéro un mondial du gaz dans le giron de l'État. Mission accomplie en 2005 lorsque l'État redevient majoritaire au capital. Vladimir Poutine le remercie en le transférant au poste de premier adjoint du Premier ministre. Il apparaît enfin au grand jour dans les habits du " monsieur social " du gouvernement.UN HOMME TOTALEMENT COULE DANS LA VERTICALE DU POUVOIRExhibé en permanence à la télévision comme celui qui distribue logement et aides sociales, sa popularité croît vite. L'image proprette d'un Dmitri Medvedev totalement coulé dans la verticale du pouvoir bâtie par Vladimir Poutine est le sujet de nombreuses blagues en Russie. Mais l'image est quelque peu fallacieuse, si l'on en croit le politologue indépendant Dmitri Orechkine : " Medvedev a déjà manifesté des différences de point de vue, sur la nomination de directeurs indépendants aux conseils des grandes corporations d'État. Il a critiqué l'idéologie officielle dite de la "démocratie souveraine"qui lui semble absurde. Mais surtout, une fois à la présidence, il aura bien plus de pouvoir que n'en aura Poutine à la tête du gouvernement. Et les clans rivaux vont pousser les deux centres de pouvoir l'un contre l'autre pour régler leurs différends. " Spontanément ou forcé, Dmitri Medvedev pourrait bientôt sortir les ciseaux et couper le cordon ombilical, à la stupeur de son mentor...
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