Les maires confrontés au défi du droit au logement opposable

Par latribune.fr  |   |  593  mots
Le logement est l'une des préoccupations majeures des électeurs pour cette campagne électorale. Toutes les communes n'ont pas affiché jusqu'à présent le même souci de proposer une offre variée de logements à leurs administrés, loin de là. En témoigne l'enquête de la Fondation Abbé Pierre (FAP), publiée le 13 février dernier, et consultable sur le site de l'association. " Depuis la mise en application de l'article 55 de la loi en 2002 [...], force est de constater que de (trop) nombreuses communes refusent toujours de contribuer à l'effort de solidarité en matière de logement ", accuse la FAP, qui juge ce résultat " affligeant ".736 communes sont soumises à la loi SRU (solidarité et renouvellement urbain), et doivent donc disposer de 20 % de logements sociaux en 2020. L'étude de la FAP porte sur 720 d'entre elles, les autres ne présentant pas toutes les informations nécessaires. Il en résulte que 23,3 % de ces communes ont moins de 10 % de logements sociaux et 22,4 % en ont moins de 5 % ! Ni la couleur politique du maire, ni la composition sociologique de la ville ne sont des critères déterminants. Dans les villes de plus de 50.000 habitants, Neuilly-sur-Seine a ainsi le plus faible taux de logements sociaux (2,6 %), tandis que des villes également gérées par la droite comme Annecy ou Versailles affichent respectivement des taux de 17 % et 16,1 %.En matière de logement, les maires disposent d'un éventail d'outils à leur disposition. Les communes ou les intercommunalités sont en charge du plan local d'urbanisme. Opposable aux tiers, le PLU est un outil précieux. Il définit en effet, de façon très précise, les projets urbains, parcelle par parcelle. Il est en général élaboré pour une petite dizaine d'années, donc pour une durée supérieure à une mandature. Pour contraindre les promoteurs à favoriser le logement social sur sa commune, le maire peut aussi jouer de sa signature autorisant - ou non - des permis de construire. Un promoteur a un projet ? " Sa première démarche est d'aller voir le maire, pour lui présenter son projet. À partir de là, le maire peut poser ses conditions pour que le projet contienne X logements sociaux ", raconte Jean-Paul Bourgès, à la Fédération habitat et humanisme.POPULATIONS LOCALES HOSTILESEnfin, le maire dispose du droit de préemption. Jusqu'à présent, il pouvait l'activer dès qu'il y avait "déclaration d'intention d'aliéné ", à condition que cette préemption corresponde à un intérêt général déjà déclaré antérieurement. Par exemple, pour construire une école. Avec la mise en oeuvre du Droit au logement opposable (Dalo), une commune qui veut aujourd'hui préempter pourra le faire plus facilement à partir du moment où elle juge que la transaction va la priver d'une possibilité de construire du logement social.Encore faut-il que les élus souhaitent aller dans cette direction. " Les maires de droite comme de gauche sont convaincus de la nécessité de faire du logement social, estime Jean-Paul Bourgès. Mais les plus hostiles sont... les populations locales. Chaque citoyen voit de sa fenêtre. " Les maires auraient donc un gros travail de pédagogie à faire.La mise en oeuvre du Dalo, prévue pour la fin de l'année, est censée pousser en ce sens. Mais beaucoup d'associations d'aide aux mal-logés craignent que la mise en oeuvre de la loi ne conduise à installer les ménages concernés en priorité dans les quartiers à forte densité de logements sociaux. Ce qui n'aurait pour effet que de renforcer les ghettos existants.