Le patronat critique sévèrement la politique économique du gouvernement

Six semaines après la victoire de la gauche, le divorce paraît déjà prononcer entre le patronat et le pouvoir socialiste. Le président de la commission économique du CNPF, Denis Kessler, s'est livré hier à un impitoyable réquisitoire contre la politique du gouvernement en présentant le rapport « Cartes sur tables ». Elaboré chaque année, ce document expose les propositions patronales pour surmonter les difficultés des entreprises françaises et promouvoir « un nouveau modèle de développement économique et social ». L'organisation patronale lance une sérieuse mise en garde contre les dangers des choix arrêtés par l'équipe Jospin pour tenir les engagements de campagne. La relance de la croissance par le pouvoir d'achat ? « Le problème numéro un de la France n'est pas la consommation. C'est l'investissement des entreprises, en panne depuis sept ans », estime Denis Kessler. Le CNPF, qui refuse « une relance artificielle de la consommation », critique notamment la récente augmentation du Smic. Il rappelle, graphiques à l'appui, qu'une revalorisation du salaire minimum plus rapide que celle du salaire moyen se traduit automatiquement par une augmentation du chômage des jeunes non qualifiés. Une mauvaise recette. La baisse de la durée du travail pour développer l'emploi ? Une recette fausse et dangereuse pour le patronat. « Une réduction obligatoire et généralisée contribuerait à augmenter le chômage en réduisant la croissance », avertit le CNPF, en soulignant que, contrairement aux autres pays, le taux d'activité en France a reculé depuis dix ans, passant sous la barre des 60 % en 1995, contre 65 % à 70 % ou plus dans les autres pays industrialisés. La création de 350.000 emplois publics pour les jeunes ? Un contre-sens économique, pour l'organisation patronale, puisque le poids des dépenses publiques est déjà le principal handicap de l'économie française aujourd'hui. Quant à l'éventualité d'une taxation des entreprises « les plus prospères » évoquée par le gouvernement, elle suscite la colère des chefs d'entreprise. « D'habitude, on récompense la vertu et on taxe le vice », a ironisé hier Denis Kessler, en demandant qu'on arrête de « montrer du doigt » les entreprises qui réussissent... Le CNPF conteste l'analyse du gouvernement selon lequel le partage de la richessproduite par les entreprises s'est effectué ces dernières années au détriment des salariés. Il reconnaît, certes, que le taux de profit des entreprises progresse mais ajoute aussitôt qu'il reste inférieur de 50 % à celui de leurs principaux concurrents... « Lever les obstacles ». Dans la droite ligne des recettes libérales qu'il défend depuis des années, le patronat plaide une nouvelle fois pour une déréglementation du marché du travail et un allégement du poids de l'Etat dans l'économie. Pour lutter contre le chômage, il faut « lever les obstacles à une véritable fluidité de l'emploi », notamment « les rigidités législatives et réglementaires », alléger le coût du travail en modifiant le système de financement de protection sociale, réformer la gestion des effectifs publics. Le CNPF préconise notamment de revoir les mécanismes de politique salariale dans le secteur public et d'« adapter » les régimes spéciaux de retraite. Delphine Girard
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