La Thaïlande s'est résolue à laisser filer sa monnaie

c'est finalement chose faite : les autorités monétaires viennent de décréter un flottement du baht, ce qui s'apparente de facto à une dévaluation. Le baht, jusque-là indexé sur un panier de devises dominé par le dollar, fluctue dorénavant au gré du marché. En fin de journée, il s'échangeait aux alentours de 29 bahts pour 1 dollar, soit une dépréciation de l'ordre de 18 %. La banque centrale augmentait son taux de base de 2 points à 12,5 % pour soutenir la monnaie. Du coup, la Bourse a enregistré une hausse 7,8 %. Mais les observateurs restent divisés sur les effets à long terme sur l'économie. Attaques spéculatives. La Banque de Thaïlande a agi sous la pression. Le ralentissement de l'économie, la stagnation des exportations, le creusement du déficit courant, la crise de l'immobilier et du secteur bancaire et surtout un manque de confiance croissant dans la compétence du gouvernement ont provoqué depuis l'an dernier une série d'attaques spéculatives contre le baht. La plus violente, en mai, a pu être contrecarrée par la Banque de Thaïlande. Depuis, un contrôle des changes informel a été mis en place. Le maintien d'un baht fort coûte cher. Les réserves de change ont baissé depuis mai de 4 milliards de dollars à 33,3 milliards. Et toute l'économie a été affectée par la politique déflationniste qui impose de hauts taux d'intérêt. Au Credit Lyonnais Securities à Singapour, on considère la mesure « excellente ». La baisse des taux qui va en découler « à court terme » permettra de doper l'économie. En revanche Neil Saker, directeur de la recherche chez SocGen, appartient au camp des « anti ». La dévaluation, pour lui, est déstabilisante et contre-productive. « C'est une très mauvaise nouvelle qui va accentuer la récession alors que les fondamentaux se portaient mieux. » « C'est une mauvaise médecine qui va bénéficier à peu d'entreprises et accroître l'inflation et le déficit courant », renchérit Mark Greenwood, de First Asia Securities. Presque 80 % de l'endettement extérieur proviennent du secteur privé et sont libellés pour la plupart en dollar. Ce qui fait craindre de nombreuses faillites industrielles. Crise d'ajustement. Les analystes sont en revanche unanimes à espérer une baisse des taux rapide. « Le flottement ne suffit pas. Il faut à court terme une chute des taux de 18 % à 8 % et injecter des liquidités sous peine d'annuler l'effet de relance », explique un banquier étranger. « Cette mesure a deux effets positifs, résume Mark Greenwood. La dévaluation est inférieure aux 20 % ou 25 % que l'on pouvait craindre. Ensuite elle a une grande portée psychologique, puisque l'on va enfin arrêter de parler de son éventualité. Cela laisse le champ libre pour s'attaquer à d'autres problèmes. » La crise d'ajustement que subit la Thaïlande s'avère plus profonde. Le Credit Lyonnais Securities, le plus pessimiste, escompte maintenant une récession de 1 % cette année, alors que les prévisions du gouvernement sont à 5,9 %. Hélène Vissière, à Bangkok
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