Réformes économiques : encore du pain sur la planche

Continuer d'appliquer les plans de réformes engagés sous les auspices du Fond monétaire international tout en réussissant à faire redémarrer l'activité industrielle, telle sera la tâche économique prioritaire du gouvernement d'Ahmed Ouyahia, dont la composition sera annoncée au cours de la semaine. L'Algérie ayant obtenu plusieurs prêts financiers et le rééchelonnement d'une grosse partie d'une dette qui pénalisait fortement l'économie locale, la nouvelle équipe devra faire renouer le pays avec la croissance (nulle en 1995) avant 1998. C'est à cette date butoir que les premiers paiements des créances reportées interviendront et que le solde de balance des paiements courants risquera d'être à nouveau négatif. Pour relancer la machine, les responsables envisagent de privatiser une partie des entreprises publiques tout en engageant plusieurs grands travaux d'infrastructures. Un programme ambitieux nécessitant une amélioration de la situation sécuritaire et qui se heurte à de nombreuses critiques locales. « Il est urgent de gommer le bilan mitigé de deux années de restructuration. L'Algérien moyen a souvent l'impres- sion que l'ouverture économique n'a servi que les intérêts des spéculateurs et des importateurs qui gaspillent l'argent obtenu grâce aux rééchelonnements sans contrepartie productive », estime l'universitaire Rabah Grassmi. D'autres voix, plus acerbes, accusent le pouvoir de se contenter, dans la réalité, de gérer la rente pétrolière. « Pour l'heure, et malgré les satisfecits du FMI, rien ne semble indiquer que les réformes ont porté leurs fruits et aujourd'hui encore le pays ne survit que grâce à l'exportation des hydrocarbures. Il faudra bien un jour que nous cessions de vivre au-dessus de nos moyens », déclarait récemment un ancien ministre à propos de l'annonce de la signature d'importants contrats entre la société pétrolière Sonatrach et des compagnies occidentales telles que British Petroleum. Les officiels algériens réfutent ces critiques, estimant que l'année 1995 a été marquée par de nombreuses améliorations. « La loi des finances 1996 a été plus facilement élaborée qu'auparavant, notre maîtrise du déficit public est réelle et il est réaliste de tabler pour 1996 sur une croissance de 3 % », déclare à La Tribune un ministre sortant. Mais bien qu'elle ait prévu pour la première fois depuis des années un excédent de 24 milliards de dinars (2,4 milliards de francs), cette loi de finances que vient de signer le président Zéroual prévoit encore plus de rigueur et d'austérité. Si un « filet social » reste prévu pour compenser les effets de l'inflation et l'abandon progressif du soutien des prix des produits de première nécessité, les Algériens devront malgré tout se serrer encore plus la ceinture. Dès le 1er janvier, une série d'augmentations de prix était effective, touchant notamment le gaz, l'eau, le pain, le lait et tous les carburants. « Espérons qu'Ahmed Ouyahia sera moins pressé de plaire au FMI que son prédécesseur. Il est grand temps que l'on fasse le point en toute démocratie sur la portée des réformes engagées depuis deux ans. En Algérie aussi il y a un risque de conflits sociaux majeurs qui ne pourraient que servir les extrémistes », avertit un responsable de l'Union générale des travailleurs algériens (UGTA), le principal syndicat du pays. A. E.
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