MOYEN-ORIENT + Le régime de Damas mise sur un rapprochement économique avec Bagdad

Après une brouille de plus de dix-sept ans, la Syrie et l'Irak semblent s'acheminer vers une timide réconciliation marquée notamment par une relance des échanges économiques officiels. Plusieurs délégations commerciales irakiennes ont ainsi visité la Syrie au cours de ces dernières semaines et les deux capitales s'apprêtent à rouvrir des frontières fermées depuis 1982. Plus important encore, Damas souhaite faire de ses ports méditerranéens de Lattaquié et de Tartous des points de déchargement des marchandises à destination de l'Irak dans le cadre de la résolution de l'ONU dite « pétrole contre nourriture ». « Il n'est pas question, pour l'instant, de rétablir immédiatement des relations diplomatiques (rompues depuis 1980, Ndlr). Mais nous souhaitons, dans un premier temps, développer nos relations économiques avec la Syrie », explique un officiel irakien qui estime nécessaire la création d'un espace économique commun entre la Syrie, la Jordanie et l'Irak à un moment où « le processus de paix avec Israël apparaît définitivement condamné ». Un fournisseur substantiel. D'autres experts relèvent que la Syrie est déjà, malgré l'embargo, l'un des premiers fournisseur de l'Irak. « Il existe un flux substantiel d'échanges entre la Syrie et l'Irak du fait de l'importante contrebande qui prolifère dans les régions frontalières. Dans les marchés de Bagdad, les produits syriens sont nombreux, mais leurs prix, en dollars, restent néanmoins élevés », explique l'économiste d'origine irakienne Akram M. Salah. De fait, le phénomène a pris une telle importance - il est évalué à plus d'un milliard de dollars - que les deux régimes ont décidé de prendre les choses en main. « En ouvrant une voie officielle aux échanges, Bagdad va faire diminuer les prix des produits syriens sur son marché tandis que Damas engrangera des recettes fiscales qui lui échappaient jusqu'à présent », se risque-t-on à pronostiquer au niveau de la chambre de commerce d'Alep. Pris en tenaille. Mais ce rapprochement surprise entre les deux frères ennemis du nationalisme arabe s'explique aussi par la position actuelle de la Syrie sur l'échiquier régional. Pris en tenaille entre Israël et la Turquie, qui viennent de signer un important accord de coopération militaire, le régime de Hafez Al Assad multiplie ainsi les tentatives de briser son isolement. « Damas s'oppose d'abord à la normalisation avec Israël, ce qui pousse les diplomates syriens à réclamer le boycottage de la future conférence économique régionale. D'autre part, une alliance irako-syrienne, même économique, est à même d'inquiéter Israël et d'influer sur la position des autres pays arabes de la région », estime un diplomate français. « Franchement je ne crois pas que les deux régimes puissent s'entendre un jour. Cela étant, des avancées dans le domaine économique ne sont pas à exclure. Elles pourraient modifier l'équilibre régional », conclut de son côté Akram M. Hassan. Akram Ellyas
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