Hausse des prix sans précédent à Bucarest

La Roumanie est plongée dans une situation financière comparable à celle de l'Amérique latine dans les années 80 : les capitaux nationaux s'expatrient et les investissements étrangers sont de plus en plus rares », commentait hier un membre du conseil d'administration de la Banque nationale de Roumanie, après que le gouvernement roumain eut annoncé, mardi, une hausse massive des prix des produits pétroliers. Visés par ces augmentations spectaculaires (58 % pour le litre d'essence à la pompe) : le chauffage, l'électricité, les transports. Il y a moins d'une semaine, une mission d'experts du FMI était venue demander au président roumain, Ion Iliescu, d'activer la prise de décisions économiques. En jeu, la seconde tranche d'un accord stand-by bloqué depuis octobre 1995. Or, la Roumanie a un besoin urgent de devises. « La facture pétrolière se paie en dollars. La glissade continuelle de la monnaie roumaine rend extrêmement difficile le paiement de ce type d'importations », explique à Bucarest un économiste. Et les réserves en devises sont inférieures à un mois d'importations. « Ce résultat est lié à l'aveuglement des autorités monétaires roumaines qui ont imposé un taux de change politique, supprimant de facto le marché des changes », estime l'administrateur de la Banque nationale. La monnaie, le leu, qui s'échangeait début 1995 à 1.700 pour un dollar, a chuté à 2.600 en fin d'année dernière, pour se négocier aujourd'hui, au change officiel, à 3.040. Sous le manteau, les bureaux de change officieux offrent jusqu'à 3.600 lei pour un billet vert. « Le FMI demande que les prix des produits ne soient pas subventionnés. Une dépréciation monétaire incessante constitue indirectement une subvention des prix des produits importés, payés en devises. Les autorités roumaines ont donc pris la bonne décision en décidant de ces hausses », se réjouit un expert, à Washington. La politique des « petits pas » Le coût social de ces augmentations, dans un pays en proie à de perpétuels mouvements sociaux depuis la « révolution » de décembre 1989, va peser sur une population dont le salaire moyen mensuel est de 300.000 lei, environ 450 francs. Outre ce coût social, c'est la stratégie économique des autorités qui rend perplexes les observateurs, alors que la date des élections présidentielles vient d'être fixée au 3 novembre. « Il n'est pas du tout sûr qu'en matière de réformes économiques, la politique des "petits pas", qui semble avoir en Roumanie assez d'adeptes, soit réaliste », explique Silviu Cerna, doyen de la Faculté de sciences économiques et de droit de Timisoara. Dénonçant la politique d' à-coups du Premier ministre, Nicolae Vacaroiu, certains intellectuels estiment que les dernières mesures ne constituent pas une politique économique à long terme. La Bourse de Bucarest, où seules treize sociétés sont cotées, a légèrement baissé après l'annonce de ces hausses de prix. Eric Revel
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