La politique de change suisse fait école

Par latribune.fr  |   |  457  mots
monnaieIl ne se passe quasiment plus un jour sans qu'un responsable de la Banque Nationale Suisse n'agite la menace d'interventions sur le marché des changes pour casser toute velléité de hausse du franc, qui reste bon an mal an une valeur refuge en temps de crise. Et pour l'instant ça marche. Depuis la mi-mars, date de la première intervention en solo de la BNS depuis 1992, les gnomes de Zurich ont empêché leur franc de franchir la barre de 1,50 pour un euro, bien qu'ils se défendent d'avoir un objectif de change.guerre monétaire larvéePourtant, dans une grande majorité des cas, lorsqu'une banque centrale engage une partie de bras de fer avec les spéculateurs, ce sont eux qui en sortent vainqueurs. Mais ce constat vaut surtout lorsqu'un institut d'émission tente de soutenir sa monnaie en proie à des attaques. C'est l'inverse que recherche la BNS, comme l'avait fait la très agressive Banque du Japon jusqu'en 2004. Le marché des changes risque cependant rapidement de se lasser. Car en cette période troublée de tentative de sortie de crise, nombreux sont les pays qui redoutent qu'une monnaie forte ne vienne peser sur la reprise de leur économie. La Suisse pourrait donc rapidement faire des émules. À commencer par la Russie. Après avoir épuisé plus du tiers de ses réserves de changes au second semestre 2008 pour contrôler la chute du rouble aspiré vers le bas par la déroute des prix des matières premières, la banque centrale de Moscou a tourné casaque. Au cours des cinq derniers mois, le rouble a regagné 16 % de sa valeur face au dollar et selon Morgan Stanley, il est « inévitable » que la banque Rossii intervienne pour prévenir une appréciation supplémentaire. Depuis près d'un an maintenant, la Banque populaire de Chine muselle, elle aussi, sa monnaie, après avoir laissé le yuan s'apprécier de plus de 20 % face au dollar. Mais ces deux géants émergents sont loin d'être des cas isolés. On a vu récemment la Banque de Réserve d'Australie vendre des dollars locaux, les « aussie », contre des billets verts des États-Unis dans des proportions que l'on n'avait pas revues depuis cinq ans. Ainsi que la Riksbank suédoise laisser filer sa monnaie, en procédant, pas plus tard que jeudi, à une baisse des taux que personne n'avait anticipée.Mais il y a un problème : tous les pays ne peuvent pas avoir une monnaie faible en même temps. Personne ne peut dire aujourd'hui qui sortira gagnant de cette guerre monétaire larvée. Mais une chose est sûre, elle risque d'être dommageable à une reprise harmonieuse des échanges internationaux. Isabelle Croizard