Les prévisions de Nouriel Roubini, l'homme qui avait annoncé la crise

Selon Nouriel Roubini, la fin de la récession interviendra à la fin de 2009. Mais l'ancien conseiller économique de l'administration Clinton met en garde contre une possible rechute l'an prochain.La récession est-elle terminée aux États-Unis ?Si l'on se fie aux prévisionnistes, on serait déjà sorti de la récession, et la croissance reviendrait au second trimestre de 2009. Mais, de mon point de vue, ce tableau optimiste doit être nuancé. J'estime de mon côté que la récession aux États-Unis se terminera à la fin de cette année et non cet été. De plus, la croissance retrouvée sera anémique pendant deux ans et en dessous de son potentiel. Elle devrait atteindre 1 % aux États-Unis (contre 2,75 % de croissance potentielle) ainsi que dans les autres pays industrialisés. Enfin, je n'exclus pas le scénario d'une reprise avortée, qui déboucherait sur une rechute du PIB vers la fin de l'année prochaine : le risque existe notamment à cause d'une possible forte hausse des matières premières et d'une inquiétude légitime sur le niveau des déficits publics.L'endettement public américain devient effectivement préoccupant?Il va doubler, passant de 40 % du PIB américain avant la crise à environ 80 % ! Même l'administration Obama et le président de la Réserve fédérale, Ben Bernanke, admettent que la politique budgétaire actuelle n'est pas tenable à moyen terme. La réduction du budget et la compression des dépenses sont donc indispensables, sinon les États-Unis vont se retrouvés confrontés à une dynamique d'endettement insoutenable, et la notation de la dette américaine, actuellement « AAA », pourrait être abaissée.La baisse récente du dollar signale-t-elle la fin de la toute-puissance du billet vert ?À court terme non, mais à un horizon de dix à vingt ans et avec l'émergence des puissances économiques comme la Chine ou l'Inde, il y aura une nouvelle donne monétaire : d'autres devises, comme la monnaie chinoise, deviendront non pas une alternative au dollar mais complémentaires au billet vert. Le déclin de ce dernier ne se produira pas du jour au lendemain : à court terme, les Chinois vont continuer d'accumuler des réserves en dollars.La reprise de l'économie mondiale viendra-t-elle justement des pays émergents comme la Chine ?Oui, à certaines conditions. La reprise sera en effet médiocre dans les pays développés. Cela tient à plusieurs facteurs, tels la démographie ou le niveau élevé des dettes privée et publique, qui auront un impact négatif sur la croissance de ces pays. À l'inverse, les pays émergents affichent un potentiel de croissance beaucoup plus élevé, compris entre 6 % et 7 %, et pourraient donc repartir de façon plus solide. Mais leur modèle économique fondé sur les exportations vers les pays « dépensiers », à l'instar des États-Unis, n'est plus valide. Ils doivent donc apprendre à ne plus se reposer sur la seule demande externe. S'ils veulent continuer à croître comme par le passé, il leur faut pousser leur demande privée et leur consommation interne. Reste à savoir s'ils parviendront à faire les réformes structurelles leur permettant d'épargner moins et de consommer plus. Ces réformes sont possibles, mais elles demandent un certain nombre d'années. D'ici là, la croissance des pays émergents continuera à dépendre de celle des États-Unis, de l'Europe et du Japon, laquelle s'annonce lente pour deux ans, si ce n'est plus longtemps.La Banque centrale européenne (BCE) vient de laisser son taux directeur à 1 %, malgré l'inflation tombée à zéro dans la zone euro. Son attitude est-elle adaptée à la crise ?La BCE a fait trop peu et trop tard, en comparaison avec la plupart des autres banques centrales qui ont aujourd'hui des taux d'intérêt effectifs à zéro. Francfort devrait utiliser toute la panoplie des mesures non conventionnelles de politique monétaire comme le rachat d'obligations ou de titres de dette des États, alors que la traditionnelle politique monétaire ne fonctionne pas à ce stade.Trouvez-vous bonne l'idée de la Fed d'autoriser dès la semaine prochaine certaines banques américaines à rembourser les prêts de leur programme public d'aide dit TARP ?Certes, à cause du TARP, des contraintes pèsent sur ces banques. Mais, si l'an prochain le chômage américain atteint 11 % comme prévu, certains de ces établissements financiers remboursant actuellement l'argent reçu via le TARP pourraient être amenés à réclamer à nouveau des aides publiques. Les « stress test » des banques n'ont pas été suffisamment « stressants » : ils se basaient sur un scénario d'un chômage à 10,3 % en 2010, un niveau qui sera atteint dès le mois d'août !Propos recueillis par Frank Paul Weber, à Mil
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