EDF vient défier GDF-Suez sur son précarré belge

Par latribune.fr  |   |  539  mots
C'est la réponse du berger à la bergère. EDF, contré dans l'Hexagone par le nouveau géant de l'énergie GDF-Suez, va lui porter la contradiction sur ses terres historiques, la Belgique, en prenant le contrôle de son principal concurrent local SPE. L'électricien français a annoncé hier la conclusion d'une double opération avec le britannique Centrica. Il revend à ce dernier 20 % de British Energy, pour 2,3 milliards de livres (2,5 milliards d'euros). En paiement, Centrica apportera ses 51 % dans l'énergéticien belge SPE, valorisé 1,3 milliard d'euros, et le solde (soit 1,2 milliard d'euros) en cash.À première vue, les termes financiers de ce troc ne sont pas très favorables à EDF. Le titre a d'ailleurs perdu 5,62 % à Paris. Le groupe français, qui avait prévu de revendre 25 % de British Energy à Centrica au prix auquel il l'a acheté, en a finalement cédé 20 % seulement, avec une décote de 6 %. « C'est un ajustement quasi symbolique », se défend Pierre Gadonneix, le PDG d'EDF. « Au contraire, cet accord est une confirmation de la valeur de British Energy », ajoute-t-il, provocateur. De fait, les discussions ont été très longues avec Centrica car ses actionnaires refusaient d'avaliser le prix payé par EDF pour British Energy. Celui-ci reposait sur un mégawatt échangé sur le marché britannique aux alentours de 80 livres, tombé entre-temps à 35 livres.ObstinationCertains analystes sont même allés hier jusqu'à évoquer un risque de dépréciation de British Energy ? éventualité écartée fermement par Pierre Gadonneix. « La décote de minoritaire sur British Energy peut se justifier, mais elle a été largement noyée par la surcote payée sur SPE », estime ainsi CM-CIC.Centrica avait mis la main sur 25,5 % de SPE en juillet 2008 pour 515 millions d'euros. Mais, depuis, le britannique a dû ajouter 105 millions d'euros en échange de droits de tirage nucléaire de 250 MW, prévus par la loi belge Pax Electrica II (fournis par GDF-Suez). Hors droits de tirage, EDF retombe sur le prix qu'il avait proposé mi-2008 pour les 25,5 % de SPE que GDF devait vendre pour obtenir le feu vert de Bruxelles à sa fusion avec Suez. En exerçant son droit de préemption, Centrica avait alors écarté le français.Obstiné, Pierre Gadonneix est donc finalement parvenu à ses fins en prenant le contrôle de SPE. Même si Electrabel (filiale de GDF-Suez) domine très largement le marché belge, avec 70 % des ventes d'électricité et 72 % de celles de gaz, SPE est le deuxième opérateur du pays. « Le gouvernement belge est très satisfait de la création d'un concurrent face à un opérateur très dominant », se réjouit Pierre Gadonneix. L'État avait en effet profité de la fusion GDF-Suez pour imposer des cessions et ouvrir ainsi à la concurrence ce marché très fermé. Le pétrolier italien ENI vient ainsi de boucler l'achat auprès de Suez du fournisseur de gaz Distrigaz. Reste à savoir jusqu'où EDF est prêt à jouer le jeu de la concurrence pour capter des clients de son frère ennemi.Et Pierre Gadonneix espère ne pas s'arrêter là en matière de troc. « Nous discutons échange d'actifs avec E.ON, notamment autour de leur participation dans le futur EPR de Penly », a-t-il déclaré.