Sarkozy et Barroso arrachent à Bush la promesse d'un sommet mondial

Par latribune.fr  |   |  763  mots
José Manuel Barroso, le président de la Commission de Bruxelles, et Nicolas Sarkozy ont toutes les raisons de se montrer satisfaits de leur étape à Camp David, samedi, où ils se sont entretenus avec le président George Bush : les deux dirigeants européens lui ont arraché un accord de principe pour l'organisation, non pas d'un, mais de plusieurs sommets internationaux, dont le premier pourrait se tenir dès le mois de novembre aux États-Unis. Cette réunion, au niveau des chefs de gouvernement, aurait pour objet de " discuter de la crise financière actuelle et de formuler des principes qui guideraient les suivants ", selon la Maison-Blanche.Le président français, qui est à l'origine de cette initiative en faveur d'un " Bretton Woods bis ", du nom de la conférence de juillet 1944 qui mit en place un nouvel ordre international financier, devra, s'il veut arriver à ses fins, surmonter le scepticisme de Washington, peu enclin à se laisser enfermer dans un carcan réglementaire et multilatéral. Car de nombreux détails restent flous. Le format de la réunion, tout d'abord. Côté français, on plaide en faveur d'un sommet regroupant à la fois les pays du G8, mais aussi ceux du G5 (Chine, Inde, Brésil, Mexique et Afrique du Sud), et " un pays arabe ". Le calendrier des rencontres, ensuite. Le communiqué de la rencontre de Camp David se contente d'évoquer un rendez-vous " peu après les élections américaines ". Mais l'administration actuelle ne semble pas particulièrement pressée.RETICENCES DE WASHINGTONCe manque d'enthousiasme des États-Unis pour les institutions multilatérales n'est guère nouveau, comme en témoignent la dénonciation par Washington du protocole de Kyoto, le refus de reconnaître le Tribunal pénal international, l'intervention armée en Irak sans l'aval de l'ONU... De même, l'administration Bush ne voit pas d'un très bon oeil un " renforcement " du mandat du FMI, comme l'ont appelé de leurs voeux Nicolas Sarkozy, Angela Merkel ou Gordon Brown.C'est précisément dans ce contexte d'opposition de part et d'autre de l'Atlantique sur l'avenir de la supervision et de la réglementation financière qu'a éclaté, samedi, l'affaire DSK (lire ci-contre), source d'affaiblissement pour le directeur général du Fonds Monétaire international.Hier, le porte-parole du gouvernement français, Luc Chatel, a rendu hommage à ce dernier, qui " a démontré dans toute la traversée de la crise financière, qu'il était à la hauteur des événements ". L'Élysée compte en effet sur le patron du FMI pour soutenir sa réforme des institutions internationales. Début octobre, à l'occasion des assemblées annuelles du FMI et de la Banque mondiale, Dominique Strauss-Kahn avait déjà plaidé en faveur d'un élargissement du mandat du Fonds, considérant que l'institution avait toutes les cartes en main pour cette réforme.Le Fonds cherche sa voieLa crise financière actuelle est-elle de nature à redonner de la pertinence au Fonds monétaire international, ne serait-ce que parce que certains pays ont de nouveau besoin de lui ? En pleine déconfiture, la Hongrie, l'Islande, l'Ukraine, la Serbie l'ont déjà sollicité ou envisagent de le faire. De quoi redonner du grain à moudre à une institution en mal d'identité et dont l'encours des prêts (correspondant à son " chiffre d'affaires ") s'est brutalement tari ces dernières années. Affranchies de sa tutelle, plusieurs nations émergentes ont multiplié les critiques à l'égard de l'institution, tandis que les pays riches n'hésitaient pas non plus à ignorer les avis de l'organisation. Ainsi, quand le FMI avait averti, dès l'an dernier, des risques sur l'immobilier américain - il avait prêché dans le désert. Idem lorsqu'il avait chiffré, en avril, les pertes liées à la crise du crédit à quelque 1.000 milliards de dollars... Si la crise a remis en selle l'institution, elle ne lui a toutefois pas encore apporté le respect... Cité par l'agence Reuters, Raghuram Rajan, un ancien chef économiste du Fonds, ironise : " Le FMI s'inquiétait de l'inflation quand le problème était déjà la liquidité sur les marchés financiers, puis il s'est focalisé sur la liquidité quand le problème était la solvabilité des banques, et enfin, il s'est intéressé à la solvabilité alors que l'heure était en fait à la panique totale sur les marchés. " Au-delà des mots, ce sont peut-être ses actions qui pourront redorer le blason du FMI, comme les négociations qu'il pourrait entreprendre vis-à-vis de l'Islande, dès cette semaine, ou l'aide à apporter à l'Ukraine (jusqu'à 14 milliards de dollars) et à la Hongrie.Lysiane J. Baudu