« En 2009, nous

Par latribune.fr  |   |  1166  mots
Comment Colas a-t-il été affecté par la crise ?En France, à partir de septembre 2008, les investissements de nos clients privés (promoteurs immobiliers, sociétés qui aménagent des plates-formes logistiques ou des parkings), qui représentent un tiers de notre activité, ont diminué de manière drastique. Côté investissements publics, la diminution du nombre d'appels d'offres n'a commencé à se faire sentir qu'en décembre 2008-début 2009. Aux États-Unis, la crise a démarré un an auparavant.Le deuxième trimestre s'annonce-t-il meilleur que le premier ?La baisse de 10 % de notre chiffre d'affaires au premier trimestre est principalement due, en France, aux intempéries et au décalage d'investissement des collectivités locales, traditionnel après des élections municipales, et à l'international, à la fin de grands chantiers non récurrents. Je ne sais pas encore ce que sera le deuxième trimestre mais le second semestre 2009 devrait se traduire par une montée en puissance de l'activité, à l'inverse du second semestre 2008, en raison principalement des plans de relance.Commencez-vous en à ressentir les effets outre-Atlantique ?En Amérique du Nord, où nous réalisons 17 % de notre chiffre d'affaires (3 milliards de dollars en 2008), et en particulier aux États-Unis, les plans de relance ont été massifs, très rapides et très orientés vers les infrastructures. Dans le Missouri, par exemple, nous avons répondu à un appel d'offres en février et nous avons pu démarrer les travaux dès mars ! Les États ont 120 jours pour engager l'argent qu'ils reçoivent de l'État fédéral, et toute somme non dépensée ou engagée doit être rendue.Les plans de relance européens seront-ils aussi efficaces ?Ils sont moins massifs et surtout plus lents. L'argent est bien dans le circuit budgétaire, mais le temps qu'il arrive dans la mairie, que celle-ci lance l'appel d'offres, attribue le chantier et que les travaux commencent, il se passe quelques mois. Toutefois, ces plans sont très orientés vers nos métiers. En France, les affaires arrivent, en particulier grâce au remboursement anticipé de la TVA réservé aux collectivités locales qui investissent au moins un euro de plus que la moyenne des trois dernières années. Les collectivités locales auraient déjà sollicité 5 milliards d'euros de remboursements anticipés. De ce point de vue, le plan de relance est un franc succès. Finalement, avec quelques mois de décalage, nous allons peut-être connaître ce que nous vivons aux États-Unis ? sur de plus petits volumes, puisqu'il s'agit de chantiers lancés par des collectivités locales et non par des États. Les problèmes de financement portent plus sur les grands projets d'infrastructures. Nous postulons sur les trois lignes TGV (Tours-Bordeaux, Le Mans-Rennes, Nîmes-Montpellier) aux côtés de Bouygues Construction. La garantie de l'État, mise en place dans le cadre du plan de relance, pourrait aider, mais en partie seulement, au montage financier de projets.Le Grenelle de l'environnement vise notamment à transférer des flux de trafic routier vers le ferroviaire. Or, en décembre, trois projets autoroutiers ont été relancés. N'est-ce pas contradictoire ?Nous n'avons pas lu le Grenelle comme un adversaire de la route. La construction de routes ou d'autoroutes est toujours justifiée si elle permet d'améliorer la sécurité, diminuer la congestion, etc. Bien sûr, le Grenelle dit aussi qu'il faut favoriser les transports en commun. Les différents modes de transport sont complémentaires.Pour le financement des grands projets de transports urbains, on parle de plus en plus de péages urbains. Qu'en pensez-vous ?Cofiroute, dont nous sommes actionnaires à 17 %, va bientôt ouvrir un des premiers péages urbains en France, le tunnel de l'A86 [entre Rueil-Malmaison et Vaucresson (Hauts-de-Seine), Ndlr]. Si c'est une solution pour financer les infrastructures qui apportent moins de pollution et plus de sécurité, pourquoi pas ? À Londres, Singapour et Milan, les systèmes mis en place ont essentiellement pour but de limiter la circulation automobile en centre-ville.Que préconisez-vous pour repenser les infrastructures routières dans le cadre du Grand Paris ?L'ouverture du tunnel de l'A86 est un premier pas pour faciliter les déplacements dans la couronne parisienne. D'ici à 2020, il faudra certainement des infrastructures routières et ferroviaires pour désengorger la traversée de Paris. Je ne suis pas un spécialiste de la circulation et de l'urbanisme, mais il faudra certainement des « rings ». Pékin en compte sept.Où en êtes-vous de vos projets à l'international ?Nous souhaitons d'abord nous renforcer dans les pays où nous sommes déjà présents, sur les cinq continents. Nous avons encore beaucoup à faire, en Europe centrale ou de l'Ouest ou aux États-Unis et au Canada. En Algérie, nous avons déjà réalisé des infrastructures ferroviaires. Nous regardons la Turquie, qui a d'importants besoins en infrastructures, mais aussi les pays pétroliers du Moyen-Orient qui ont des infrastructures importantes et des besoins considérables d'entretien. Dans tous ces pays, nous avons engagé des discussions avancées, mais nous n'avons pas de cible précise.Vous vous êtes renforcé dans le ferroviaire en acquérant Spie Rail. Votre filiale ferroviaire Colas Rail [issue du mariage de Seco-Rail et de Spie Rail, Ndlr] est-elle aussi prometteuse que prévu ?Les nouveaux projets de LGV sont encore au stade de l'appel d'offres. À partir de 2011, les premiers coups de pioche devraient être donnés. Le métier historique de Colas Rail est l'entretien des voies. Colas Rail compte des équipes et des matériels d'entretien très sophistiqués, capables de rénover très rapidement une voie ferrée. Or Réseau Ferré de France a lancé un énorme programme de rénovation de ses infrastructures ferroviaires, afin d'assurer une meilleure sécurité. Des milliards d'euros doivent être investis sur les cinq années à venir. Aussi, le marché de Colas Rail est immense, en travaux neufs (Colas Rail a fait une partie de la ligne TGV Est, où le record du monde de vitesse a été battu), comme en travaux d'entretien. L'activité ferroviaire, qui représente 4 % du chiffre d'affaires de Colas, est appelée à se développer car ce marché est très important en Europe et sa croissance plus importante que celle du marché routier. Et il ne faut pas oublier les tramways. De nombreuses villes (Paris et Montpellier) complètent les lignes existantes, tandis que d'autres (Brest, Angers ou Reims) construisent leurs toutes premières lignes.En dépit de la crise, continuez-vous à recruter ?Bien sûr. Sur les cinq dernières années, nous avons recruté environ 8.000 personnes par an. En 2009, nous recruterons encore 5.000 à 6.000 personnes. En période de crise comme celle que nous vivons, il ne faut surtout pas arrêter le recrutement des jeunes, sinon nous en souffrirons dans les prochaines années parce que nous n'aurons pas les hommes et les femmes d'expérience sur lesquels Colas s'appuie pour répondre aux importants besoins d'infrastructures dans le monde.