Les complémentaires santé d'entreprises sous pression

Par latribune.fr  |   |  600  mots
Les complémentaires santé sont confrontées à trois bouleversements juridiques. Au point que les spécialistes s'interrogent. « La protection sociale d'entreprise devient un sujet d'une extrême complexit頻, remarque Anne André, directrice général d'Aon Consulting protection sociale et actuariat. Un arrêt de la cour d'appel de Lyon du 13 janvier 2009, confirmant l'arrêt de la Cour de cassation du 7 février 2008, oblige en effet l'assureur, en vertu de la loi Évin, à proposer à l'ancien salarié ? retraité ou licencié ? une couverture identique à celle dont il bénéficiait avant de quitter l'entreprise. Surtout, cet arrêt interdit d'augmenter le prix pour ce retraité de plus de 50 % du tarif payé par les salariés. En parallèle, l'Accord national interprofessionnel (ANI) signé l'an dernier, prévoyant le maintien de la couverture santé et prévoyance des salariés devenus chômeurs, devait s'appliquer fin janvier. Sa mise en ?uvre a été repoussée au 1er mai. Enfin, les dispositions de la loi Fillon sur les contrats collectifs responsables bénéficiant d'exonérations fiscales sont en vigueur depuis le 1er janvier, mais il manque toujours une circulaire précisant certaines modalités. « Le contexte réglementaire et juridique déstabilise et inquiète », résume Anne André.Les conséquences à court terme sont limitées car les contrats collectifs sont renouvelés la plupart du temps en début d'année. Les renouvellements pour 2009 sont donc déjà effectués. En revanche, « j'anticipe en 2009 pour 2010 des hausses de tarifs et peut-être même des remises en cause plus importantes de certains contrats collectifs », confie Anne André. Pour cette professionnelle du courtage d'assurance, « si la complémentaire santé représente à la fois un risque de redressement Urssaf en raison d'une application imparfaite de la loi Fillon et un surcoût du fait des hausses de tarifs dans les années à venir, les entreprises vont s'interroger sur le rapport coût-efficacité des contrats collectifs ».Mais la menace la plus lourde vient de l'arrêt du 13 janvier dernier qui prévoit l'alignement de la couverture des retraités sur celles des salariés. « 800.000 personnes partent à la retraite chaque année, potentiellement le risque de contentieux est élev頻, souligne Mathias Matallah, président de Jalma, société de conseil qui vient de publier son 10e « Panorama de l'assurance sant頻. Chaque retraité pourrait en effet attaquer l'assureur de la complémentaire santé collective s'il ne lui propose pas une couverture identique à celle dont bénéficient les salariés de l'entreprise qu'il quitte. Pour Matthias Matallah, « le problème est l'encadrement tarifaire de cette obligation. 50 % de plus que les salariés, cela ne suffit pas ». Selon Jalma, les dépenses des retraités sont deux fois plus élevées que celles des actifs. sujet politiqueEt si demain la Sécurité sociale se désengageait même partiellement de la couverture des affections longue durée (ALD) touchant notamment les plus âgés, le coût pour les complémentaires serait énorme. Seul assureur à réagir publiquement, Jean-Claude Albinet, président de l'Union nationale des mutuelles d'entreprises, souligne que vingt ans après l'adoption de la loi Évin, qui prévoyait cette solidarité intergénérationnelle entre actifs et retraités, « on est confronté à ses limites ». « La loi est à revoir », estime-t-il. Les fédérations d'assureurs et d'institutions de prévoyance peaufinent leurs études d'impact et leurs propositions. « Nous avons pris contact avec le gouvernement car, au fond, le sujet est politique. La question est de savoir s'il est légitime de faire payer les actifs pour les retraités », précise un proche du dossier.