L'offre en épargne retraite est assez peu diversifiée

Par latribune.fr  |   |  995  mots
Le problème du financement des retraites touche toutes les sociétés. Aux États-Unis, par exemple, de nombreux baby-boomers arrivés à l'âge de la retraite repoussent leur départ faute de revenus suffisants pour vivre décemment. En France, les autorités parlent d'en repousser l'âge à 67 ans contre 60 aujourd'hui. Se pose donc la question de l'épargne de long terme. « C'est plus que jamais nécessaire », estime l'AFG (Association française de la gestion financière) dans son rapport d'activité 2008-2009. L'association s'est ainsi fixée comme priorité de « mettre en place un statut européen incitatif pour l'épargne salariale, l'actionnariat salarié et les produits d'épargne complémentaire ».En attendant, les pays ont mis en place différentes formules. En France, les autorités ont introduit en 2003 le Perco (plan d'épargne retraite collectif), version française de l'épargne retraite en entreprise. Depuis, ce produit connaît un intérêt constant. Selon l'AFG, et malgré la crise, sur les trois premiers mois de l'année, le nombre d'entreprises équipées a augmenté de 40 %, à 84.769, et le nombre d'adhérents de 33 %, à 452.802. En termes d'encours, ils ont grimpé de près de 33 % en 2008 à 1,8 milliard d'euros. C'est encore très loin des 2.400 milliards de dollars du populaire plan 401k aux États-Unis, principal produit de retraite concernant 48,5 millions de salariés.équipes dédiéesL'une des particularités de l'épargne salariale réside dans la mise en place de l'offre de produit la composant. Au-delà du choix du gestionnaire et du teneur de compte, l'entreprise participe à la sélection des fonds proposés. Fabrice Pansard et Bruno Séjourné, respectivement directeur des études à l'AMF (Autorité des marchés financiers) et maître de conférence à l'université d'Angers, ont analysé, entre autres, ce point dans une étude intitulée « L'épargne retraite en entreprise : un état des lieux au regard de l'expérience américaine ». « Que cela passe par un appel d'offres ou dans le cadre d'une offre du réseau à la TPE, les entreprises jouent un rôle important dans la sélection des fonds proposés à leurs salariés », indique Bruno Séjourné. Dans le cas des grandes entreprises, elles disposent parfois d'équipes dédiées, « les Anglo-Saxons faisant aussi appel à des consultants externes », ajoute Fabrice Pansard. Cela est rare dans les PME, qui retiennent plutôt un fournisseur en fonction des frais et des services proposés et non de la gestion.Aux États-Unis, pour attirer l'entreprise puis le salarié, les sociétés de gestion mettent en avant un fonds « star », noté cinq étoiles. Mais il est difficile de maintenir la qualité de la notation sur long terme. « Les sociétés de gestion n'hésitent donc pas à réduire les frais de gestion sur ce produit pour conserver une bonne performance en les répercutant sur le reste de l'offre », a constaté Bruno Séjourné. Pratique peu courante en France sur le Perco selon les deux auteurs. Outre-Atlantique, la gamme peut contenir entre un et plusieurs dizaines de fonds. La contrepartie étant une performance moyenne médiocre des fonds proposés. Et pose la question de la construction d'un portefeuille optimal.offres standardMais, aussi bien aux États-Unis qu'en France, l'offre vient la plupart du temps d'une unique société de gestion qui réalise la sélection elle-même et ne manque pas de proposer seulement ses produits. Cela est plus rémunérateur et rend ces services finalement rentables. « Les fournisseurs ont donc développé des offres standard notamment pour les PME qui n'ont pas les moyens d'avoir de l'architecture ouverte », indique Fabrice Pansard. Les grandes sociétés, à l'image de la clientèle privée, peuvent exiger de l'architecture ouverte, de la multigestion. Cela permet une meilleure diversification de l'offre et du risque. Car, selon l'étude, ne proposer que des produits maison peut entraîner une corrélation forte entre les fonds, « en raison d'un adossement à un unique scénario économique et financier aboutissant à des choix d'allocation tactique convergents et à des choix de firmes et de secteurs homogènes ». C'est un biais d'allocation constaté aux États-Unis et en France. « Pour intégrer de l'architecture ouverte dans l'épargne salariale, le teneur de compte doit pouvoir facturer ce service à l'entreprise, explique Fabrice Pansard, ce qui peut augmenter le coût pour le salarié. » Et d'ajouter : « Il y a une inertie tant du côté de l'offre que de la demande. » Pour changer l'offre de produit, il faut, dans le cadre du Perco, passer par un accord collectif avec les partenaires sociaux. Du côté de la demande, il y a finalement peu de réallocations. Les salariés sont assez fidèles. Alors que les arbitrages sont le plus souvent gratuits, ils le sont davantage sur les flux que sur les stocks. Avec la crise, qui a fortement détérioré les portefeuilles, on imagine qu'il y en aura en faveur des produits sécurisés. Les salariés qui ont opté pour une gestion pilotée de leur Perco pourraient donc réduire leur exposition aux actifs risqués notamment s'ils sont proches de la retraite. Mais, pour ceux qui en sont encore loin, c'est moins sûr. De même pour ceux qui ont choisi une gestion libre de leur produit. Cette option comporte certains risques notamment quand l'épargnant n'est pas familier avec les techniques de gestion. Cela peut conduire à une allocation déraisonnable et à de fortes déconvenues. Pour éviter cela, il pourrait être utile d'être conseillé par des professionnels. Mais l'épargne salariale n'est pas visée par la directive sur les instruments financiers, dite MIF. Aujourd'hui, il n'y a rien de formalisé sur ce sujet parce que « le Perco n'est pas commercialisé par un intermédiaire (banque, assureur?) à un particulier mais proposé aux salariés par l'entreprise, précise Fabrice Pansard. Il n'y a donc pas d'obligations de conseil aux épargnants ». L'AMF déclare y réfléchir.