Cruciale triangulaire

Dans les feuilletons des bagarres en Bourse, les spectateurs aiment bien les épisodes à rebondissements. Celui qui s'est joué hier, autour de la Bourse de Londres, ne les aura pas déçus. En une seule journée, Francfort a abattu ses cartes, Londres les lui a renvoyées assez vertement tandis qu'Euronext a lancé ses premiers hameçons officiels. De quoi largement ranimer une guerre qui, jusque-là, se déroulait surtout dans les coulisses. Le jeu de rôle des uns et des autres a de quoi réjouir les amateurs de sensations boursières fortes. D'abord Francfort et sa tactique déroutante. Voilà donc un attaquant qui depuis le début de cette affaire n'a cessé de se découvrir, lâchant l'essentiel de ses munitions avant même que l'offre d'achat ne soit officiellement lancée. Au menu de la danse du ventre d'hier, toute une série de concessions majeures destinées à rendre plus attractive une offre de mariage que la City regarde d'un oeil plutôt circonspect. Ensuite Londres, qui fait l'effarouchée. Dans l'affaire, la place britannique a tout à gagner et se retrouve dans une situation pour le moins paradoxale : alors qu'il est de notoriété publique que l'entreprise de la Bourse, le LSE, ne brille ni par ses résultats ni par ses performances industrielles, la voilà hissée au rang enviable de belle à marier, diablement convoitée. Enfin Paris, qui joue la partie en matou attentif. Depuis le début, Euronext observe en silence l'activisme débridé de Francfort, distille au goutte-à-goutte ses propres intentions, et attend tranquillement son heure. Pourquoi tant d'empressement ? La partie triangulaire qui se joue en ce moment dépasse un simple enjeu industriel ou financier : le gagnant, qui aura dans sa besace plus de 4.000 sociétés cotées et l'essentiel des transactions qui comptent, deviendra de facto "la" place européenne, seule à même de rivaliser avec ses homologues américaines. Le perdant sera relégué dans les limbes des micromarchés du Vieux Continent. On comprend qu'à Paris, qui a pour atout son succès dans le lancement en 2000 de la seule place paneuropéenne et un système informatique ouvert et éprouvé, on soit plus qu'attentif au dossier.
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