Froid dans le dos

Le film des cinq jours qui ont vu la Société Générale frôler la catastrophe absolue laisse pantois. Car il révèle une défaillance profonde des modes de fonctionnement de la finance. Premier acte : les dirigeants de la Société Générale, informés des agissements de son trader fou, alertent aussitôt leurs autorités de tutelle, en l'occurrence l'AMF, la Banque de France et par répercussion la BCE. Deuxième acte, la banque dénoue ses positions en trois jours, en pleine crise des marchés financiers. Troisième acte, Bercy, puis Matignon puis l'Élysée sont mis au courant... six jours plus tard, une fois la banque sortie d'affaire. Ce déroulé fait froid dans le dos. Car les questions qu'il pose donnent une idée assez effrayante de la conception qu'ont nos grands argentiers de la façon dont se gère une crise d'une telle ampleur. Première question : pourquoi, si on croit ses propos, la Réserve fédérale américaine n'a-t-elle pas été informée ? Si c'est vrai - le seul fait que les versions sur le sujet diffèrent d'un côté à l'autre de l'Atlantique n'a rien pour rassurer - voilà qui donne une lecture assez particulière des rapports entre deux institutions majeures, la Fed et la BCE. Ce dysfonctionnement illustre à nouveau le défaut de concertation des deux institutions. On connaissait les divergences de vues entre Jean-Claude Trichet et Ben Bernanke sur la gestion de la crise financière des derniers mois. On peut désormais imaginer qu'ils se cachent des choses... Face aux enjeux - une crise financière qui fait trembler la finance mondiale - il y a de quoi s'inquiéter. Deuxième question : en soldant ses positions, la Société Générale a-t-elle précipité la chute des places européennes ? On ne saura jamais. On comprend que les épargnants se posent la question. Et on se doute que, si la Fed avait su, son dispositif d'intervention aurait peut-être été différent : Ben Bernanke aurait-il procédé à la baisse des taux massive décidée mercredi dernier ? Troisième question : est-il imaginable que le pouvoir politique ne soit pas tenu au courant d'événements aussi graves ? Voilà qui donne une idée de la qualité de la relation et du degré de confiance entre nos institutions financières et nos gouvernants politiques. Et dire que ces gens-là sont censés veiller à la bonne marche des affaires et à la sécurité de l'épargne des Français...
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