Affaire Bidermann : Le Floch-Pri gent contre-attaque

Loïk Le Floch-Prigent passe à l'attaque. Sur un terrain où l'on n'attendait pas le nouveau président de la SNCF : celui des « affaires ». Et plus précisément sur le dossier qui, depuis deux ans, empoisonne les jours de l'ancien PDG d'Elf Aquitaine, l'affaire Bidermann. Autre surprise, c'est par une lettre envoyée à une centaine de cadres de Gaz de France que Loïk Le Floch-Prigent a décidé de rompre un silence auquel il s'était tenu jusqu'à présent. La lettre, il est vrai, porte la date du 20 décembre, date à laquelle Loïk Le Floch-Prigent était encore président de GDF, mais la missive n'est arrivée auprès de ses destinataires que le 2 janvier. « Le devoir de réserve constitue pour tout président de grand groupe public ou privé une forte obligation... » explique en préambule la lettre. L'ancien patron d'Elf aurait « donc continué à garder le silence » sans un récent rapport de la Cour des comptes. « Et sans l'utilisation qui en a été faite », ajoute-t-on dans son entourage. Première anomalie, c'est par la presse, et notamment par un article de l'Expansion datée du 16 octobre 1995, que Loïk le Floch-Prigent apprend l'existence de ce rapport confidentiel, suite à une mission de la Cour effectuée en octobre 1993, soit deux mois après son départ du groupe. Elle porte sur les « comptes et la gestion des sociétés financières filiales du groupe Elf » de 1988 à 1993. Or, curieusement, la Cour a effectué sa mission sans entendre une seule fois le principal intéressé, dont elle n'hésitera pas pourtant à mettre sévèrement en cause la gestion. Mais les « anomalies » ne s'arrêtent pas là. En découvrant, dans les journaux et magazines, le rapport « confidentiel » de la Cour, l'ex-PDG d'Elf remarque plusieurs contre-vérités flagrantes à ses yeux. Notamment le montant des pertes : 2,5 milliards de francs, qu'auraient enregistré sous sa présidence les filiales financières d'Elf. D'où vient l'erreur ? Pour en découvrir l'origine, Loïk Le Floch-Prigent devra attendre d'avoir entre les mains, le 8 novembre dernier, le fameux rapport de la 6e chambre de la Cour des comptes. Le président de cette chambre en avait bien transmis un exemplaire à Philippe Jaffré, l'actuel PDG d'Elf Aquitaine, pour qu'il soit transmis à son prédécesseur. Mais, dans un retour à l'envoyeur, Philippe Jaffré rétorque au magistrat de la rue de Cambon qu'une « entreprise privée n'avait pas à se substituer à la Cour pour assurer la diffusion des documents en cause ». Sans que le magistrat ne s'en émeuve puisqu'il fallut l'intervention de Pierre Joxe, le président de la Cour des comptes, à la demande de l'ancien patron d'Elf, pour que le rapport lui soit remis. A partir de là, Loïk Le Floch- Prigent a vite fait d'observer qu'un certain nombre de documents ayant trait à sa gestion n'ont pas été communiqués à la Cour par « l'autorité en place », à savoir par Philippe Jaffré, et que certaines des explications données se révèlent « partielles, voire tout simplement fausses ». L'affaire devrait donc rebondir par la volonté de celui dont on pensait qu'il avait tout intérêt à la voir étouffée. « La Cour n'a pas fait son travail. Et on a cherché à la tromper », prévient-on dans l'entourage de Loïk Le Floch-Prigent. La guerre est désormais déclarée entre ce dernier et son successeur. Mais le nouveau patron de la SNCF n'a sans doute pas allumé la mèche sans l'assentiment des pouvoirs publics. Elisabeth Rochard
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