Stavros Dimas fait une peur " verte " aux entreprises

Ancien avocat d'affaires de Wall Street, Stavros Dimas est devenu la bête noire des entreprises européennes. Le commissaire à l'Environnement va déclencher une nouvelle fois aujourd'hui l'ire des industriels : il présente, objectifs chiffrés à l'appui, les efforts que l'Union européenne (UE) doit fournir pour lutter contre le réchauffement climatique. Jusqu'à la dernière minute, il a bataillé contre le commissaire à l'Industrie, Günter Verheugen. Au final, Bruxelles propose aux Vingt-Sept de réduire leurs émissions de gaz à effet de serre de 20 % d'ici à 2020, par rapport au niveau de 1990. C'est moins que les 30 % qu'espérait le commissaire grec. Mais mieux que la fourchette de 10 % à 15 % que défendait son homologue allemand.Pour Stavros Dimas, le signal envoyé compte de toute façon autant que les chiffres : entreprises et États membres ne se débarrasseront pas de sitôt des plafonds d'émissions de CO2, nés dans la douleur depuis 2005. Au contraire, ces quotas - qui donnent du fil à retordre à la France - vont s'appliquer à un nombre croissant de secteurs. C'est bien ce qui gêne l'Unice, qui regroupe le patronat européen et s'agace de voir l'UE se piquer de jouer les pionniers en matière environnementale. Au risque d'" infliger aux entreprises européennes des coûts qui desserviront leur compétitivité ", selon le patron des patrons européens, Ernest-Antoine Seillière. Ce n'est pas l'Europe sociale, bien discrète, qui inquiète les chefs d'entreprise mais l'Europe environnementale.À mi-mandat, Stavros Dimas a, il est vrai, trouvé un rythme de croisière soutenu. " Il a mis un peu de temps au démarrage, reconnaît sa porte-parole, Barbara Helfferich. Il lui a fallu apprendre. Mais maintenant il est lancé. Et difficile à arrêter. "30.000 SUBSTANCES AU CRIBLE En décembre, il a mis un point final à une décennie de débat sur la législation chimique européenne : les entreprises vont être contraintes de passer au crible quelque 30.000 substances pour mieux les contrôler. Il vient en outre de proposer d'inclure le transport aérien dans le système de quotas de CO2. Et, fin janvier, ce sera au tour de l'industrie automobile de passer à la moulinette : Stavros Dimas veut imposer, pour 2020, une limitation des émissions de CO2 pour les nouvelles voitures. Lors de la même réunion, il proposera une nouvelle catégorie pénale européenne : le crime environnemental.Ainsi fait-il progresser les thèmes chers aux défenseurs de l'environnement : principe de précaution, règle du " pollueur-payeur ". Tout en organisant avec fermeté la mise en musique du protocole de Kyoto. La Commission pourrait acquérir, dans ce domaine, un pouvoir écologique similaire à celui qu'elle détient dans les finances publiques via le Pacte de stabilité.Stavros Dimas avait pourtant été fraîchement accueilli lors de son arrivée à Bruxelles à l'automne 2004. Piètre orateur, il n'avait pas fait bonne impression au Parlement européen. Les élus n'ont accepté sa nomination que du bout des lèvres. Cet ex-ministre de l'Industrie, ex-avocat d'affaires, issu de la droite grecque, " n'a pas d'expérience dans le domaine de l'environnement ", soulignaient les eurodéputés. Ses contempteurs d'alors reconnaissent aujourd'hui que le fait de n'être pas estampillé " écolo " lui a sans doute permis d'avancer plus efficacement, dans une Commission majoritairement libérale. " Stavros Dimas n'est pas véritablement un poids lourd de la Commission, estime un diplomate. Mais il dirige sa barque plus habilement que les défenseurs de l'environnement ne le craignaient. "VENTS FAVORABLESPlus d'une fois ses propositions - sur le transport aérien notamment - ont été bloquées par le président de la Commission José-Manuel Barroso lui-même. Pragmatique, il a attendu, patiemment, avant de revenir à la charge. Le changement de climat politique sur l'environnement, avec le rapport Stern sur le réchauffement climatique, lui permet de profiter de vents plus favorables. " On l'avait mis là, de toute évidence, pour qu'il avalise les combines pro-industries, analyse Lorenzo Consoli, journaliste et ancien responsable de Greenpeace. Voilà qu'il se révèle un bel enquiquineur. "
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