Jean-René Fourtou, président honoraire de Vivendi

A-t-il seulement entendules protestations ? Il est si loin de ces préoccupations. Le projet d'externalisation de 1.900 personnes de trois centres d'appels de SFR, présenté hier en comité central d'entreprise, ne le concerne pas. Il est président du conseil de surveillance de Vivendi. Pourtant, les salariés, appelés à quitter le groupe au 1er août, ne peuvent s'empêcher de penser aux promesses passées, aux entorses faites. Jean-René Fourtou s'était engagé lui-même, en 2003, à créer des emplois chez SFR, et notamment dans les centres d'appels. À l'époque, il négociait le bénéfice mondial consolidé du groupe. Un dispositif " d'optimisation fiscale " qui devait permettre au groupe d'économiser environ 5 milliards d'euros d'impôt. En contrepartie, le dirigeant avait promis au ministre des Finances de créer des emplois. Il l'avait même fait inscrire dans le rapport annuel. À Bercy, le ministre s'appelait Nicolas Sarkozy.Jean-René Fourtou aimerait sans doute oublier cet épisode. Parachuté il y a tout juste cinq ans à la tête de Vivendi, sans rien connaître aux métiers du groupe, par la grâce du soutien de Claude Bébéar, ilpréfère assurément que son action soit résumée d'une phrase : " Il a sauvé Vivendi. " Dans les premiers temps, il a assurément sorti le groupe d'une crise de solvabilité qui avait provoqué le départ de Jean-Marie Messier. Renégociation de lignes de crédit avec les banques, vente de la branche édition, dont une partie deviendra Editis en France, avant d'entreprendre un coup de poker d'anthologie face à Vodafone persuadé de pouvoir reprendre toute la filiale de téléphonie mobile à un prix cassé. En quelques semaines, il avait réussi à mobiliser les fonds nécessaires pour racheter à SBC ses 26 % dans Cegetel qui allait donner enfin la majorité à Vivendi dans cette filiale essentielle pour son avenir et ses finances.TROP NOMBREUX VOYAGESLa période critique a duré huit mois, un an au plus. Depuis, la stratégie de la holding réside essentiellement dans des arbitrages de participation. Le groupe a abandonné son activité cinéma et télévision (Universal Studios), aux États-Unis, à NBC pour un prix qui a laissé perplexe de nombreux observateurs. Il s'est renforcé dans la si profitable filiale Maroc Telecom, a perdu l'assistance avec ses invraisemblables démêlés en Pologne. Au-delà de cette gestion, Jean-René Fourtou n'a jamais réussi à incarner un souffle, une dynamique. Mais est-il jamais parvenu à se passionner pour ce monde de l'Internet, des nouvelles technologies et des loisirs qu'il a découvert à 63 ans ? Chaque filiale a mené sa vie, avec un succès certain, notamment pour SFR et Canal Plus.Jean-René Fourtou, lui, a découvert les avantages de sa charge. Bien qu'ancien PDG de Rhône-Poulenc, puis vice-président d'Aventis, il n'avait jamais eu accès à autant de pouvoir et de reconnaissance. Un petit actionnaire - un grincheux sans doute - finit par s'émouvoir de ses nombreux voyages et déposa plainte. La brigade financière releva sur les bordereaux d'Aéro Services que M. Fourtou avait effectué des vols à titre personnel représentant la somme d'1,16 million d'euros entre 2002 et 2003. Pour éteindre l'affaire, le conseil lui a demandé de rembourser 147.577 euros. La réprimande s'est arrêtée là.SA GESTION CRITIQUEEMalgré son âge, jamais il n'a été question pour lui de partir ou d'évoquer au conseil son remplacement. Au contraire, celui-ci a accepté de transformer son poste de PDG en président du conseil de surveillance, ce qui lui a permis d'échapper au couperet des statuts. En privé, pourtant, certains administrateurs ne sont pas toujours tendres sur sa gestion. " Il faudrait démonter tout le groupe. " Lui a dissuadé tous les candidats qui pourraient avoir quelque projet sur Vivendi, de KKR à Permira en passant par Eurazeo. Depuis, c'est le calme plat.Et la spéculation qui entourait le titre est un peu retombée. L'action cote 31,90 euros. Les actionnaires historiques sont loin d'avoir retrouvé leur cours d'antan. Jean-René Fourtou a été plus chanceux. Après avoir promis de prendre sa charge gracieusement, il s'est ravisé. Il a demandé salaire plus stock-options. Le 18 juin 2007, comme l'a révélé le magazine Challenges, il a exercé une partie de ses options. Plus-value : une trentaine de millions. S'il réalisait tout, sa fortune s'élèverait à 90 millions d'euros.
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