Frédéric Thiriez joue sa tête sur les 600 millions d'euros du foot

Cet appel d'offres, c'est ma responsabilité. Si c'est un échec, ce sera mon échec. " Frédéric Thiriez, président de la Ligue de football professionnel (LFP), est lucide. Aujourd'hui, se déroule la phase finale de l'appel d'offres des droits du championnat de football de la Ligue 1 pour la période 2008-2012. Au cours d'une journée marathon, neuf candidats, parmi lesquels Canal Plus, Orange, TF1, France Télévisions et M6, miseront sur les 12 lots concoctés par Frédéric Thiriez et ses équipes. Dans une configuration idéale, tous les lots auront trouvé preneur en fin de journée à un tarif au moins équivalent au prix de réserve fixé Frédéric Thiriez. Dans le cas contraire, une seconde phase d'enchères, plus ou moins longue selon les premiers résultats, aura lieu avant d'entamer des négociations de gré à gré dans l'hypothèse d'un nouvel échec. Au Royaume-Uni, le dernier appel d'offres a duré plusieurs semaines.RELATIONS AVEC LES POUVOIRS PUBLICSL'enjeu est énorme pour Canal Plus, actuel détenteur exclusif des droits TV de la Ligue 1, et pour le monde du football, largement télédépendant. Frédéric Thiriez, dont le mandat de président de la LFP arrive à échéance en décembre, est attendu au tournant. Sa mission : obtenir plus de 600 millions d'euros par an. Même s'il dit " travailler sérieusement depuis dix-huit mois sur le dossier ", le président, âgé de cinquante-six ans, réfléchit depuis longtemps à son 3e appel d'offres de Ligue 1. Depuis sa fusion avec TPS, Canal Plus ne répète-t-il pas à tout va qu'il entend baisser la facture de la Ligue 1 ?Face à l'adversaire déclaré, cet énarque, avocat au conseil d'État et à la Cour de cassation, associé du cabinet Lyon-Caen, a marqué quelques points. L'allongement de la durée des droits du championnat, passés de trois à quatre ans par décret gouvernemental à l'automne 2007, est, jusqu'ici, son plus beau succès. Pour mener ce coup de maître compte tenu de l'avis défavorable rendu par le Conseil de la concurrence sur le sujet en juillet 2007, Frédéric Thiriez, ancien rocardien qui fait ses classes dans les cabinets ministériels du premier septennat de François Mitterrand, est allé exposer directement le problème au président Nicolas Sarkozy, qu'il a fréquenté lorsque ce dernier était ministre. " Nous avons la chance d'avoir un président qui aime le sport en général et le football en particulier ", explique Frédéric Thiriez. La décision a été prise directement à l'Élysée." Mon travail consiste à avoir des relations avec les pouvoirs publics ", explique celui qui sait soigner ses réseaux à droite comme à gauche. C'est pour faire voter des réformes législatives (droit d'image, appel public à l'épargne...) que la Ligue a élu en 2002 en remplacement de Gérard Bourgoin cet étranger au monde du football. Même en amateur, Frédéric Thiriez a pratiqué tous les sports (plongée, natation, rugby en club, parachutisme...) à l'exception du ballon rond.Autre épine mise dans le pied de Canal Plus vantée par le président : la production des matchs du championnat, que la Ligue se réserve dans le nouvel appel d'offres. " L'expérience menée sur la Ligue 2 nous a permis de voir que l'on pouvait attirer de nouveaux acteurs ", se félicite Frédéric Thiriez. À l'époque pourtant, beaucoup de patrons de grands clubs étaient contre cette décision, synonyme d'attaque frontale d'un partenaire historique.Pour porter la bonne parole footballistique auprès des politiques, ou s'insurger dans la presse contre un Canal Plus dénigrant le championnat pour en faire baisser le prix, ce chanteur lyrique amateur, qui s'est produit cette année dans La Belle Hélène d'Offenbach, n'hésite à user et abuser de ses talents de comédien. La starisation d'un homme devenu tout puissant a d'ailleurs le don d'agacer certains patrons de clubs auxquels il vole la vedette. Plus prosaïquement, les grands clubs de Ligue 1 ont montré ces derniers mois qu'ils souhaitaient prendre plus de pouvoir au sein du football français. La création à l'automne de l'association Football avenir professionnel (FAP), réunissant les grands clubs de football (OL, PSG, Monaco...) en marge de l'UCPF qui réunit 40 clubs professionnels et de la Ligue, témoigne de cette volonté. " Les clubs ont le droit d'apporter des idées nouvelles. Mon rôle est d'arbitrer entre des intérêts divergents ", répond laconiquement Frédéric Thiriez. Pour le moment, alors que son avenir est en jeu, le monde du football fait son possible pour montrer un front uni.
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