Claude Cohen, grande argentière d'un TF1 en mutation

Les analystes financiers piaffent depuis des semaines. Cet après-midi, peu leur importent les commentaires du groupe TF1 sur le résultat de 305 millions d'euros, en hausse de 1,5 %, et légèrement en deçà des attentes (310 à 315). Ce qu'ils veulent de Nonce Paolini , neuf mois après sa nomination à la présidence de TF1, c'est l'annonce d'un plan stratégique à trois ans. Claude Cohen, patronne de la régie, ne sera pas sur le devant de la scène, mais c'est sur ses résultats que les analystes basent leur constat : le chiffre d'affaires publicitaire de la chaîne leader est sous pression. Sa quasi-stagnation (+ 0,6 %) en 2007, année où les petits écrans ont pourtant accueilli pour la première fois les annonceurs de la grande distribution, serait le signe d'une tendance durable. ZenithOptimedia prévoit une croissance nulle de la publicité sur TF1 en 2009, hors réforme de la publicité sur les chaînes publiques. Si la pige du marché publicitaire attribue encore en 2007 à TF1 55 % de part de marché de la publicité télévisée, elle serait en fait tombée pour la première fois (hors parrainage) au-dessous des 50 % en 2007 (à 49 % au lieu de 50,3 % en 2006) en investissements nets, selon les estimations de Zenith.La rupture introduite par l'arrivée de chaînes plus nombreuses dans les foyers avec la télévision numérique terrestre est plus brutale que prévue, des programmes comme la Star Academy s'essoufflent : la part d'audience de TF1 est descendue sous les 30 % en janvier, (28 %) et même à 27,5 % sur une semaine de février, ( M6 tombant à 10 %). Cela alors que Emmanuel Charonnat, expert média chez Starcom (Publicis), estimait que, malgré la concurrence des chaînes de la TNT, TF1 se maintiendrait à 29 % cette année.REDUCTION DE COUTSConcurrence des médias numériques, annonceurs plus exigeants sur le retour sur investissements, et à la recherche de cibles précises que la télévision de masse n'atteint qu'au prix fort, téléspectateurs plus volatils : face à ces bouleversements, certains estiment que le modèle TF1 est moribond et que le prix à payer pour maintenir un écart d'audience qui reste considérable avec le numéro deux, y compris dans les foyers recevant la TNT, est trop élevé. Selon une note de la Deutsche Bank, les marges de TF1 sont " celles d'un mauvais élève, 7 points plus basses que celles de ses concurrents " (européens). Elle estime que " le groupe dépense trop pour les programmes pour défendre un objectif de part d'audience qui n'atteint pas un profit maximal ".Pour beaucoup d'analystes, Nonce Paoloni n'a d'autre alternative à court terme que de s'engager sur un plan de réduction de coûts. Optimisation de l'organisation, regroupement des achats, réorganisation de la programmation pour être plus réactif à la nouvelle donne, mutualisation des moyens d'information entre TF1 et LCI : autant de chantiers engagés qui devraient dégager des économies substantielles. Mais il ne devrait pas être question d'annoncer des mesures comme une réduction du coût de la grille, un virage stratégique réorientant radicalement l'entreprise vers de nouveaux revenus Internet, une rupture brusque qui prendrait le risque de perdre le lien avec des téléspectateurs qui sont encore plus de 8 millions tous les soirs devant le journal. Signe que le groupe ne remet pas en cause un modèle qui reste basé sur la recette publicitaire, le changement d'équipe dirigeante a épargné Claude Cohen. Envoyée en éclaireur il y a vingt et un ans par le groupe Hachette, candidat à la privatisation de TF1, elle est restée quand Bouygues a emporté l'affaire.TENACITE TOUJOURS COURTOISEL'entrée de TF1 privatisée dans l'ère de la télévision commerciale et son succès doivent beaucoup à sa ténacité toujours courtoise, au réseau relationnel qu'elle a tissé auprès des annonceurs. Études à l'appui sur l'efficacité de la publicité sur les ventes, Claude Cohen écarte d'un sourire l'annonce de la mort du spot de trente secondes en prime time. Seule concession aux difficultés du moment : ses équipes admettent une récente pression " insupportable " sur les prix, de la part d'annonceurs qui en oublient l'essentiel dans les négociations, la puissance des écrans de TF1.Mais, comme dans l'ensemble du groupe, le discours à la régie exclut tout bouleversement du modèle actuel. Claude Cohen devrait savoir tirer parti de la suppression de la publicité à France Télévisions et de l'assouplissement des règles de diffusion de la publicité qui pourraient apporter à TF1 de 230 à 340 millions d'euros en 2009, selon ZenithOptimedia. Des réformes qui permettraient au groupe de gagner du temps dans son adaptation au nouveau paysage.Chronologie1970 : Après des études de droit et l'École supérieure de publicité, elle démarre sa carrière comme directrice de clientèle à la régie IP.1983 : Directrice commerciale au sein d'Europe 1 Communication.1987 : Rejoint TF1 lors de la privatisation comme directrice commerciale et devient directrice générale de TF1 Publicité en 1997.2004 : Présidente de TF1 Publicité.
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