Le patron d'Hitachi lance une opération séduction en Europe

Mèche grise impeccablement coiffée sur le côté, Kazuo Furukawa vient de faire une visite remarquée en Europe. En Grande-Bretagne précisément, où le patron d'Hitachi s'est rendu ce mois-ci à l'occasion de la grande exposition qu'il a montée à Londres pour promouvoir le savoir-faire du groupe. Un événement similaire doit se tenir à Paris en mai. Deux premières pour ce formidable conglomérat - 380.000 employés et 65 milliards d'euros de chiffre d'affaires dans le monde l'an dernier - qui illustrent le nouvel intérêt que manifeste le groupe vis-à-vis du Vieux Continent. " Au Japon, l'Europe est considérée comme une société mature avec une économie mature, explique Kazuo Furukawa à La Tribune. Pourtant, cette année, c'est ici que nous réalisons notre plus forte croissance. Pas en Inde, ni en Chine, ni aux États-Unis. " Le chiffre d'affaires d'Hitachi en Europe a atteint 870 milliards de yens (5,5 milliards d'euros) en 2006-2007, soit 9 % de ses ventes mondiales, contre 7 % en 2003. Le mouvement devrait se poursuivre. " Nous atteindrons 10 % d'ici à 2010 et nous voulons arriver à 15 % dès que possible ", annonce Kazuo Furukawa.ORGANISATION REMISE A PLATHitachi espère trouver là un relais de croissance, alors que le groupe traverse une période difficile. Il a accusé une perte en 2006 qui l'a forcé à remettre son organisation à plat. Un nettoyage indispensable, s'agissant d'un conglomérat qui, comme nombre de grands groupes japonais, couvre un vaste éventail d'activités : des écrans plats et des trains aux centrales électriques, des frigidaires et des systèmes de stockage de données électroniques aux climatiseurs. Le groupe s'est restructuré en grands pôles, cédant au passage certaines branches sur des marchés devenus hyperconcurrentiels. Il a ainsi arrêté la fabrication d'ordinateurs personnels, qui étaient commercialisés sous la marque Prius. Il vient également de vendre son usine de semi-conducteurs de Singapour.La stratégie commence à porter ses fruits. Hitachi dégagera un bénéfice en 2007-2008. Mais sa marge opérationnelle reste très faible : à peine plus de 2 %, encore loin de l'objectif de 5 % visé pour le prochain exercice.C'est dans ce contexte que Fazuo Furukawa espère trouver de nouveaux débouchés en Europe. Non pas pour son électronique grand public, mais pour son activité d'industrie lourde. Un exemple spectaculaire de cette volonté a été fourni lorsque Hitachi a remporté le contrat du train rapide qui relie Londres à Ashford, la gare proche de l'entrée du tunnel sous la Manche. Sur la même voie se côtoient désormais des TGV allant jusqu'à Paris ou Bruxelles et des bullet trains destinés au trafic local. Hitachi travaille aussi sur un projet - vieux serpent de mer britannique - de liaison par train rapide entre Londres et Edimbourg. " Nous espérons développer ensuite ces succès ferroviaires dans le reste de l'Europe ", affirme Kazuo Furukawa. Qui entend bien se frotter à la concurrence d'Alstom...Le groupe japonais caresse aussi de grands espoirs pour sa branche énergie. Il vient de signer un important contrat en Allemagne pour la construction de centrales à charbon et lorgne aussi le marché de la relance des centrales nucléaires en Grande-Bretagne. " Nous avons signé [en mai] une alliance avec General Electric pour mettre en commun nos technologies nucléaires ", rappelle Kazuo Furukawa.APPROCHE GLOBALE DU VIEUX CONTINENTEn France, Hitachi exploite une usine de stockage de données près d'Orléans et un centre de recherche à Sophia-Antipolis. " La France est un marché important pour nous à moyen et long terme ", explique Kazuo Furukawa. Il cite notamment le marché des climatiseurs professionnels, ainsi que le développement des sources d'énergie renouvelable.Pour coordonner son opération séduction sur l'Europe, Hitachi a recruté il y a trois ans le Britannique Stephen Gomersall. Parlant le japonais couramment, ancien ambassadeur britannique au Japon et seul membre non nippon du comité exécutif du groupe, il défend une approche globale du Vieux Continent. " Avant, nous avions tendance à traiter l'Europe comme une succession de pays, explique Kazuo Furukawa. Maintenant, nous le traitons comme un bloc. L'Union européenne aide à standardiser les technologies, par exemple, et cela permet une approche plus centrale. "ParcoursÀ peine diplômé en ingénierie électrique à l'université de Tokyo en 1971, Kazuo Furukawa a aussitôt rejoint Hitachi, pour s'occuper des systèmes de télécommunication, le deuxième métier du groupe après les systèmes industriels et d'énergie. Il a travaillé dans ce cadre chez Hitachi Telecom aux États-Unis, de 1994 à 1997. Nommé vice-président exécutif du conglomérat en janvier 2005, il en est devenu le président et le directeur général en décembre de la même année. En 2010, Hitachi fêtera ses cent ans d'existence.
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