L'avenir du CNE en question

La mise entre parenthèses du contrat première embauche ne remet-elle pas en cause la survie du contrat nouvelle embauche ? Les deux dispositifs sont identiques : ils innovent en instaurant une période de "consolidation" du contrat pendant deux ans, période durant laquelle l'employeur peut se séparer du salarié sans invoquer de motif. Seule différence : CPE et CNE ne visent pas le même public. Alors que le premier contrat s'adresse aux jeunes de moins de 26 ans, le second est réservé aux embauches dans les entreprises de 20 salariés au plus. Pour les syndicats, demander la mort du CPE entraîne dans la foulée la fin programmée du CNE.Pour les juristes, les deux contrats sont entachés des mêmes incertitudes juridiques. La validation par le Conseil constitutionnel est loin d'assurer la pérennité de ces dispositifs qui pourraient voir leur avenir compromis par le verdict des tribunaux nationaux.Car, contrairement au Conseil constitutionnel qui a jugé dès 1975 qu'"il ne lui appartient pas d'examiner la conformité d'une loi aux stipulations d'un traité international", les juridictions nationales contrôlent, elles, la compatibilité entre les traités internationaux et les lois françaises, les premiers ayant une autorité supérieure à celle des secondes. Jurisprudence. Or les règles internationales - convention 158 de l'OIT (Organisation internationale du travail), charte sociale européenne et directive européenne de 2000 - excluent toutes un licenciement sans motif intervenant pendant une période d'essai dont la durée ne serait pas "raisonnable". Cette durée "raisonnable", la Cour de cassation en a déjà précisé les limites. Elle a ainsi jugé abusive une période d'essai de trois mois pour un coursier, de six mois pour une dactylo et d'un an pour un cadre supérieur.Pour les experts, cette jurisprudence rend plus que probable le rejet par les tribunaux judiciaires de la période d'essai de deux ans du CPE et CNE. Quant à la motivation du licenciement, le Conseil constitutionnel reconnaît lui-même, dans sa décision sur le CPE, que "toute rupture de contrat pourra être contestée" devant les prud'hommes. "Il appartiendra à l'employeur, en cas de recours, d'indiquer les motifs de cette rupture afin de permettre au juge de vérifier s'ils sont licites et de sanctionner un éventuel abus de droit." Une feuille de route pour les salariés en CPE ou en CNE qui risque fort de dissuader les entreprises de recourir à ces contrats.Delphine Girard
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