Interrogations au Japon sur l'opération

" Le conseil d'administration a décidé que Nissan devait mener des discussions exploratoires concernant une alliance potentielle avec General Motors. " C'est en ces termes laconiques que le constructeur japonais, lié depuis 1999 par des participations croisées avec Renault, a communiqué hier après être resté silencieux tout le week-end alors que dès vendredi Renault avait fait savoir qu'il avait été avec son allié nippon approché par Kirk Kerkorian pour évaluer l'intérêt que GM rejoigne l'alliance Renault-Nissan.La "magie Ghosn" en question. Nul doute que la réunion hier chez Nissan n'aura été qu'une formalité, tant Carlos Ghosn, PDG de Renault et de Nissan, conserve la mainmise sur le constructeur japonais. Mais, pour transparent qu'il soit, ce communiqué n'a pas suffi à calmer les esprits. La nouvelle de négociations a totalement pris de court l'archipel. C'est qu'elle a été rendue publique quelques jours après une mauvaise nouvelle pour Nissan : mardi dernier, Carlos Ghosn a en effet annoncé que le constructeur n'atteindrait probablement pas ses objectifs de vente au Japon au cours de l'exercice en cours. C'était la première fois que Nissan déçoit. Il n'en a pas fallu plus pour que la presse s'interroge sur la pérennité de la fameuse " magie Ghosn " qui a sorti de sa torpeur le deuxième constructeur japonais.Le retour de Carlos Ghosn à Billancourt l'an dernier, accompagné de l'équipe qui a redressé Nissan, a suscité chez les observateurs la crainte que les vieilles habitudes qui avaient mené le japonais à sa perte ne reprennent le dessus. Depuis la semaine dernière, critiquer Carlos Ghosn n'est plus tabou. " Ils ne regardent que les ventes, mais il ne faut pas oublier que Nissan reste le constructeur le plus rentable du secteur, rappelle Mia Nielsen, porte-parole de Nissan. Cette annonce montre l'extraordinaire prestige que conserve Carlos Ghosn dans l'industrie automobile. Les médias ne savent plus que penser. "Côté analyse, c'est plutôt le doute qui prévaut. Noriyuki Matsushima, analyste du secteur chez Citigroup, résume bien l'opinion générale dans une note publiée hier : " Il s'agit de comparer la situation actuelle à celle dans laquelle Renault est entré en 1999 au capital de Nissan. À l'époque, il a pris 40 % du capital et s'est installé aux commandes. Nissan avait beaucoup d'actifs à vendre pour financer la restructuration. Il y avait de la marge pour forcer les équipementiers à réduire leurs prix et les syndicats étaient coopératifs. Tous ces points sont différents cette fois. Je ne vois pas les mérites immédiats d'une telle alliance, hormis des économies d'échelle. "GM est un constructeur inconnu au Japon. Le géant américain vend quelques milliers de véhicules ici, en dépit des incessantes pressions de l'administration américaine pour que l'archipel ouvre un marché de toute manière totalement acquis aux constructeurs locaux. GM a été obligé de licencier la moitié des 260 employés de sa filiale nippone en 2003.La grande inconnue reste l'attitude de... Toyota. Le numéro un japonais est mû par son désir de dépasser GM comme premier constructeur de la planète d'ici à 2008, voire plus tôt. Il songe depuis des années à venir au secours de GM : l'an dernier, le président du groupe Shoichiro Toyoda a fait le voyage jusqu'à Detroit pour étudier une aide. " Déjà Toyota soutient beaucoup GM en fournissant des pièces à très bon prix. Ses dirigeants estiment que cette alliance est un coup de poignard dans le dos, et feront tout pour qu'elle n'ait pas lieu ", estime le représentant au Japon d'un équipementier européen qui travaille pour Toyota et Nissan.
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