Préparer la déréglementation européenne

Au 1er avril 1997, la déréglementation du transport aérien européen deviendra effective. En clair, toutes les lignes domestiques françaises, qui constituent le fond de commerce d'Air France Europe, seront ouvertes à la concurrence. Les plus intéressantes - sur Nice, Marseille, Toulouse et Bordeaux - le sont déjà, mais la concurrence n'est encore que franco-française. A horizon de neuf mois seulement, des compagnies étrangères pourront également proposer des vols, par exemple sur Paris-Nice et Paris-Marseille. Cette déréglementation s'appliquera également aux lignes interrégionales européennes (comme les liaisons Paris-Madrid et Paris-Rome) que la compagnie Air France Europe souhaitait pouvoir desservir. Mais, dans les deux cas, elle apparaît mal préparée à supporter une compétition sur les coûts d'exploitation, déterminants pour établir des niveaux de tarifs adaptés à la concurrence. Or le problème, aujourd'hui, n'est plus de vouloir s'opposer à la déréglementation pour dénoncer ses effets et l'harmonisation par le bas des conditions de travail. On voit mal Paris, qui a déjà accepté d'ouvrir une brèche dans le monopole d'EDF en France (un dossier pourtant hautement symbolique), aller à une confrontation dure à Bruxelles sur l'aérien. Une perspective de clash d'autant moins réaliste que plusieurs ministres des Transports, de droite comme de gauche, ont épousé la ligne qui mène à la déréglementation du ciel européen. Il ne reste donc plus aux compagnies publiques françaises, bon gré, mal gré, qu'à s'adapter. AOM et Air LIberté en avance Déjà, au plan national, les compagnies AOM et Air Liberté, qui ont conclu un accord commercial, ont des structures de coûts bien moins lourdes que celles de l'ex-Air Inter. Jusqu'à une période récente, tant qu'Air Liberté se limitait à des vols charter, une partie importante de ses hôtesses était employée en contrat à durée déterminée. Et encore leurs salaires avaient-ils une forte proportion variable, dépendant du nombre de vols effectués dans le mois. Ainsi, on évaluait le coût des personnels navigants commerciaux (PNC) d'Air Liberté à 15 % au-dessous de ceux d'AOM, eux-mêmes inférieurs à ceux d'Air Inter. Depuis que la compagnie présidée par Lotfi Belhassine s'est lancée sur les vols réguliers, elle s'est en partie convertie aux contrats à durée indéterminée. « Nous n'avons plus que 10 % de personnels en CDD », affirme Lotfi Belhassine. Malgré tout, il convient que sa compagnie pratique des salaires toujours au-dessous de ceux d'Air Inter pour les hôtesses et les stewards, mais il souligne qu'Air Liberté emploie six hôtesses et stewards dans des appareils où Air inter n'en compte que quatre. Quant aux commandants de bord, avec 700.000 francs de salaire annuel à Air Liberté (contre environ 1 million de francs à Air Inter), « ils sont rémunérés aux normes mondiales et européennes », souligne Lotfi Belhassine. La concurrence étrangère place également Air France Europe dans une position délicate. Le cas des compagnies asiatiques et américaines est évident, compte tenu des conditions d'embauche et de protection sociale différentes de ce qui est pratiqué en France. Même chose pour British Airways. Mais surtout, les Quinze ont accepté le principe des délocalisations de personnels sur les appareils des compagnies européennes. En pratique, cette mesure se traduira par l'embauche, sur des postes de navigants, de personnels recrutés sur des contrats de travail étrangers, à l'image de ce qui s'est répandu dans le transport maritime. Déjà, les syndicats de la compagnie allemande Lufthansa ont accepté que 10 % du personnel navigant soit ainsi « délocalisé ». Mais, avec la déréglementation, ce principe pourrait être plus largement mis en application. Déjà, l'an dernier, la compagnie Sabena avait envisagé de faire passer sa flotte sous pavillon luxembourgeois. G. B.
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