Eva Joly, des faillites aux affaires

L'oeil bleu pétillant, l'allure juvénile et le propos relevé par un léger accent qu'elle doit à son origine norvégienne, Eva Joly ne colle pas à l'image communément répandue des juges. L'apparence est trompeuse. Cette femme blnde et souriante de cinquante-deux ans est devenue le juge d'instruction de la galerie financière de Paris le plus craint des patrons. Avec ténacité et autorité, elle a déjà fait tomber, outre Bernard Tapie, Pierre Conso, président des Ciments Français, André Lévy-Lang, patron de Paribas, et encore Claude-Pierre Brossolette, un ancien directeur du Trésor, ou Nicholas Clive-Worms de la Banque Worms. Des patrons qui, pour certains, l'avaient déjà côtoyée au Comité interministériel pour les restructurations industrielles, le fameux Ciri créé par Pierre Bérégovoy. Magistrat depuis 1981, après une licence en droit et un DEA de sciences politiques, elle fut d'abord conseiller juridique à l'hôpital psychiatrique d'Etampes puis substitut à Orléans, Evry et Paris. Mais c'est à partir de 1989, au Ciri où elle est détachée, qu'Eva Joly commence à s'initier aux méandres financiers de l'économie française, en s'occupant notamment de l'épineux dossier Sud Marine, le chantier naval marseillais. Ceux qui ont travaillé avec elle à l'époque gardent le souvenir d'une maîtresse femme, « pas facile avec son franc-parler et son ton incisif, mais pleine de charme », capable de lire un bilan et de déceler les moindres subtilités d'une transaction financière, y compris celles qu'on veut cacher. Quand en 1993 elle rejoint les douze juges de la galerie financière du tribunal de grande instance de Paris, elle est parfaitement formée pour instruire les affaires délicates. « C'est l'un des meilleurs juges de la place, il est normal qu'on lui confie les dossiers les plus complexes », commente un magistrat qui tient absolument à balayer la rumeur selon laquelle Eva Joly s'acharnerait sur les patrons français de son propre fait. Et quand elle tient un dossier, elle ne le lâche pas. Sa connaissance de l'entreprise ne se limite pas aux techniques financières. Au Ciri où elle s'est spécialisée dans les entreprises en déconfiture, Eva Joly s'est familiarisée avec la psychologie du dirigeant, ses relations avec ses banques et ses actionnaires. Avec ses méthodes, aujourd'hui, elle fait des émules. S. S.
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