Nouvelle dégradation des marges bancaires en 1995

Après un exercice 1994 catastrophique, le secteur bancaire français est parvenu à sortir la tête de l'eau l'an dernier, tout en affichant toujours un manque criant de rentabilité. Ainsi, en 1995, l'ensemble des établissements de crédit a réalisé un résultat net de 19 milliards de francs - en très sensible amélioration par rapport à la perte globale de près de 11 milliards de 1994 -, soit à peine plus que les bénéfices annoncés par la seule Barclays en Grande-Bretagne (16 milliards de francs). Les raisons de cette embellie tiennent en premier lieu à la diminution de la charge du risque, puisque les dotations aux provisions ont baissé de plus de 20 %, ce qui représente un allégement de 16 milliards de francs. En second lieu, le produit net bancaire (chiffre d'affaires) s'est redressé de 3,9 %, tandis que les frais généraux ont été contenus dans une hausse de 1,4 %, permettant un redressement de 11,5 % du résultat brut d'exploitation (voir graphique). Compte tenu de ces éléments, le coefficient d'exploitation (c'est-à-dire les frais généraux rapportés au chiffre d'affaires) des établissements français est revenu de 76,9 % à 75,1 %, soit un niveau qui reste toutefois nettement supérieur aux ratios pratiqués dans d'autres pays industrialisés, où ils oscillent généralement entre 60 et 70 %. « Seulement » 19 milliards de bénéfices Quant à la rentabilité pure des banques en France, elle est extrêmement insuffisante : les 19 milliards de bénéfices de la profession rapportés à ses 779 milliards de fonds propres la font ressortir à 2,4 %, bien loin des 10 à 15 % considérés comme le « return on equity » adéquat. Si les banquiers mettent volontiers en avant la difficulté qu'il y a en France à réduire les effectifs pour améliorer les performances de leur établissement, le premier défi qu'ils ont à relever « est incontestablement celui de la restauration des marges et d'un retour à des conditions normales de concurrence », rappelle la Commission bancaire. Car, dans un contexte de demande contractée (les entreprises affichent une capacité d'autofinancement de 105 à 110 %), les banques n'hésitent pas à pratiquer des conditions qui, une fois la couverture du coût de la ressource, des frais généraux et du risque assurée, ne permettent pas de rémunérer correctement les fonds propres. Cette agressivité commerciale est particulièrement notable sur les crédits à l'habitat et surtout sur les prêts aux collectivités locales où la vente à perte n'est pas rare. Ces comportements, jugés « dangereux » par la Commission bancaire, se traduisent directement sur la marge bancaire globale des banques, qui ne cesse de se dégrader : de 2,25 % en 1993, elle est revenue à 2,02 % en 1994 et à 1,99 % l'an dernier. La virulence de la concurrence a conduit l'organisme de tutelle des banques à se pencher sur la question et à mener une enquête sur le terrain. Il est en ressorti que « certains établissements s'affranchissent dans certains cas des précautions élémentaires en matière de prise de garantie » et que « les dérogations aux barèmes internes à chaque établissement ont tendance à se multiplier ». Cette situation a conduit la Commission à une mise en garde solennelle à la profession. Il reste à savoir quand celle-ci produira ses effets. G. de C.
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