« Avec lui, il fallait faire très attention au détail » par George Shultz *

J'ai eu affaire au président Mitterrand presque uniquement sur des questions militaires et diplomatiques. Je me suis aperçu qu'on peut toujours compter sur les Français dans les moments cruciaux. Tel a été le cas avec Mitterrand. Un des plus grands moments dont j'ai le souvenir a été de le voir monter devant le Bundestag en février 1983 et parler avec grande émotion sur la nécessité de déployer des fusées Pershing en Europe. C'était une condition indispensable pour la réalisation du calendrier du déploiement des forces de l'Otan en Europe. L'Allemagne était la clé. Il fut très éloquent et s'exprima avec grande émotion et sensibilité. Ce fut une grande action de sa part. J'ai appris, en travaillant avec lui, que le plus important pour s'entendre avec les dirigeants français est de les écouter avec attention. Les vues de Mitterrand étaient très nuancées. Au sommet du G7 à Williamsburgh en 1983 nous n'arrivions pas à nous entendre sur un point essentiel du communiqué. Je suis allé le voir et j'ai essayé de suivre très attentivement son raisonnement. Je suis arrivé à surmonter ses objections, j'ai montré les modifications au président Reagan, à madame Thatcher et nous avons pu parvenir à un accord. Avec lui, il fallait faire très attention au détail. En ce qui concerne l'Alliance atlantique, la France n'était pas partie prenante du volet militaire, mais Mitterrand était très actif en ce qui concerne les aspects politiques. C'était un allié sûr, qui ne se faisait pas d'illusions à propos des Soviétiques. Les relations entre les Etats-Unis et la France étaient fondamentalement solides mais souvent entachées par des problèmes mineurs mais agaçants J'ai toujours trouvé qu'il était très formateur de l'entendre parler de l'Afrique. Il était passionné par ce continent. Mais je n'étais pas du tout d'accord avec ses propositions sur le tiers-monde. Elles étaient conceptuellement erronées. Il est important d'aider les pauvres. Mais donner de l'argent, en soi n'est pas suffisant. Il faut les mettre sur le bon chemin des politiques économiques. Il n'était pas d'accord avec moi. * Secrétaire d'Etat américain de 1982 à 1989.
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