La guerre des pôles aura-t-elle lieu ?

A l'origine des "pôles de compétitivité", il y a le concept de "cluster" anglo-saxon. Il se définit comme un réseau d'entreprises et d'institutions qui comprennent un tissu riche de clients, de fournisseurs et un bassin de compétences scientifiques et technologiques adaptées. D'essence plutôt privé, ce modèle de "cluster" a inspiré l'appel d'offres du CIADT (Comité interministériel d'aménagement du territoire) visant à sélectionner une quinzaine de sites à dominante technologique ou industrielle visible sur le plan international. Ces derniers pourront bénéficier des aides de l'Etat. L'objectif étant aussi de contribuer à la lutte contre les délocalisations. Les quelques candidats devront ainsi remettre leur projets dans deux semaines. Les sites les plus en vue sont Grenoble-Isère, Saclay et Toulouse.Cette logique d'aménagement du territoire a essuyé les critiques du Conseil d'analyse économique et du Medef. Dans un rapport du CAE, Jean-Paul Betbèze considère qu'il aurait été "plus efficace de labelliser et de concentrer les efforts financiers sur 3 à 5 pôles d'excellence reconnus mondialement afin d'attirer les investisseurs internationaux, plutôt que de saupoudrer les aides"."Offre de formation." Ces deux options sont en opposition avec celle des chercheurs et des universitaires. Les états généraux de la recherche rejettent l'idée de pôles spécialisés dans lesquels on définit d'abord des mesures fiscales, des logos, des labels, pour ensuite voir quels laboratoires on met dedans. Ils leur préfèrent des pôles de recherche et d'enseignement supérieur (Pres). "Le but des Pres est d'optimiser les projets de recherche et l'offre de formation, de servir d'interlocuteurs aux acteurs économiques locaux, de faciliter les conditions de travail des enseignants-chercheurs", souligne le collectif Sauvons la recherche.Pour Pierre Netter, directeur de l'école doctorale "la Logique du vivant", "ces pôles académiques multidisciplinaires sont l'occasion de refonder le partenariat entre organismes de recherche et universités". Plutôt un modèle MIT comme à Boston qu'un "cluster" autour d'une filière industrielle ! La conférence des présidents d'université (CPU), également favorable aux Pres, met un bémol en insistant pour que les Pres soient surtout l'affaire des établissements d'enseignement supérieur. Prônant le renforcement du principe d'autonomie, la CPU veut casser "le dualisme université-recherche d'une part et université-grandes écoles d'autre part".Cette multiplication des pôles ne risque-t-elle pas de créer la confusion ? Pour les ministères concernés, les Pres sont complémentaires des pôles de compétitivité. Mais la vision qu'ils en ont est différente de celle des chercheurs. Les moyens seraient concentrés dans quelques centres et autour de quelques thèmes très finalisés, tournés essentiellement vers la coopération public-privé et donc liés aux... pôles de compétitivité !"Les universités se trouveront démembrées avec une gestion de droit privé et un exécutif nommé par le ministre", craint la CPU. "Plutôt que de réformer la gouvernance des universités, d'alléger les contraintes administratives, le projet en l'état du ministère préfère définir des modalités de gestion et de direction des Pres", s'inquiète SLR. Le risque ? Que seules les universités associées à ces pôles bénéficient des allégements de charges d'enseignements, "mais aussi que cela ouvre sur des postes contractuels ou de droit privé", note le Snesup. L'absence d'un tel label déboucherait alors sur une accentuation des inégalités entre les régions. Y. de K.
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