La discrimination raciale en procès

Au chapitre "discrimination raciale dans le monde du travail", c'est un procès hors normes qui devrait débuter aujourd'hui au tribunal de grande instance de Paris. Ce n'est pas un restaurant qui est accusé ni une PME du BTP, mais une filiale d'Adecco, numéro un mondial du travail temporaire, et une autre de L'Oréal. Selon SOS Racisme, partie civile dans l'affaire, "un millier de salariés auraient été discriminés, ce qui ferait de cette affaire le plus grand procès du racisme dans le monde du travail".Jeunes, minces et "BBR". Tout commence en 2000. Gemey Maybelline Garnier (GMG), filiale de L'Oréal, lance une campagne de promotion pour un shampoing. Afin de trouver des animatrices, GMG s'adresse à des entreprises de communication événementielles, dont Districom, filiale d'Adecco. Districom se tourne alors vers sa maison mère pour obtenir des noms d'intérimaires. Que se passe-t-il ensuite ? Un fax aurait été adressé par une salariée de Districom à Adecco, précisant le profil adéquat des candidates. Elles doivent être jeunes, minces et... "BBR". Ce sigle, employé par le Front national pour ses fêtes, signifie "bleu, blanc, rouge", autrement dit "Français de souche". L'affaire est révélée à SOS Racisme par une salariée de Districom. L'enquête de l'inspection du travail, reposant notamment sur le comptage des animatrices retenues, selon leur patronyme, montre qu'entre la première et la seconde opération de promotion, où les consignes discriminantes auraient été appliquées, le taux de "non-BBR" est passé de 38,7 % à 2,9 %. Des témoins indiquent que ces consignes auraient été transmises par GMG.Pour Adecco, comme pour GMG, l'affaire ne repose sur rien. "Dans le dossier, rien ne montre qu'Adecco ait mis en oeuvre un recrutement discriminatoire, au contraire. De plus, Adecco propose des intérimaires qui, en fin de compte, ont été choisis par le client final par l'intermédiaire de la société utilisatrice Districom", insiste maître Vaccaro, avocat d'Adecco. De son côté, maître Jean Veil, conseil de GMG, souligne : "Aucun témoin des faits ne met en cause GMG. Le seul élément matériel, le fax, n'a été ni adressé ni reçu par GMG. De surcroît, des photos prises lors de la campagne de promotion du shampoing montrent la présence d'animatrices de couleur." Plus largement, les deux groupes affirment avoir mis en place depuis de nombreuses années des mesures anti-discrimination. L'avocat de la société Districom n'a pas donné suite à nos demandes d'entretien. Ce procès débute alors que la discrimination raciale prend une place grandissante dans le contentieux du travail.Pascal Jungh
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