Expatriés : un retour dans l'indifférence

Par latribune.fr  |   |  871  mots
Quel est ce pays qui considère que ses expatriés ne le concernent plus ? La France ! À la différence de ses voisins qui transforment leurs expatriés en de véritables ambassadeurs économiques et culturels et en font des créateurs de richesse, l'Hexagone n'a pas d'attitude proactive à l'égard de ceux qui sont partis et sont prêts à revenir. Il y aurait 2,12 millions de Français vivant hors de France. Parmi eux, près de 250.000 auraient créé des entreprises.Une étude menée par le Forum sur l'entrepreneuriat du programme Leed de l'OCDE a recensé 150 expatriés en Europe et en Amérique du Nord, parmi 9.000 identifiés envisageant un retour en France. "Leur démarche d'expatriation est positive et traduit un désir de découvrir, d'entreprendre et de réussir, alors que bien souvent elle est perçue comme une fuite (des cerveaux, par exemple)", explique François Hurel, le président du Forum. Contrairement aux idées reçues, les avantages financiers ne viennent qu'au quatrième rang des raisons qui poussent à partir. La première est l'opportunité de trouver un poste intéressant, aussitôt justi- fiée par deux raisons complémentaires : la découverte d'un nouveau mode de vie et des raisons familiales et personnelles. L'envie d'entreprendre et de développer des projets est un ressort important de la décision de partir.Qui sont-ils exactement ? Plus jeunes qu'auparavant. 44 % sont âgés de moins de 35 ans. La durée moyenne d'expatriation est assez longue. 44 % ont un contrat local. Près d'un quart des expatriés ont un statut d'indépendant. On trouve parmi eux des consultants sur des séjours de courte durée ou des créateurs d'entreprise sur des séjours beaucoup plus longs (plus de cinq ans pour 82 %). "Ces derniers sont des hommes assez jeunes (81 %), de formation supérieure (89 %). Du point de vue des compétences, on est très loin de l'image de l'émigré sans qualification parti chercher fortune", précise Sergio Arzeni, directeur du Centre pour l'entrepreneuriat de l'OCDE, cosignataire de l'enquête.Recherche de financement. À l'étranger, un quart des créateurs estiment ne pas avoir rencontré de difficultés particulières au moment de la mise en place de leur entreprise. Ce chiffre monte à 55 % pour ceux qui ont installé leur société en Europe. La principale difficulté est la recherche de financement mais elle est moindre qu'en France. 50 % contre 54 %, selon l'ACFCI, connaissent cette difficulté.Ni le fiscal ni le social ne figurent parmi les raisons déterminantes susceptibles de faire revenir les expatriés. Les premières raisons du retour sont d'abord personnelles. Les autres raisons de rentrer en France sont l'existence d'aides financières pour créer ou reprendre une entreprise. Mais l'image qu'ont les expatriés de ces soutiens les conduit parfois à douter de leur efficacité. "Le fait que les aides à la création (71,7 %) ainsi qu'à l'innovation (68,2 %) soient plus incitatives au retour qu'une opportunité de poste démontre bien l'attrait qu'a ce désir de se mettre à son compte", note le rapport.Déficit d'informations. Revenir, mais dans quelles conditions ? C'est sans doute la première question que se posent les expatriés, surtout s'ils souhaitent développer un projet de création d'entreprise. Ces expatriés ont un important besoin d'informations qui généralement n'est pas satisfait. 53,2 % des Français de l'étranger, désirant rentrer, estiment que les informations ne sont pas accessibles, et les deux tiers qu'elles sont incomplètes, voire insuffisantes. Des informations donc difficiles à trouver, à comprendre, ou qui manquent de crédibilité aux yeux des expatriés. Ce n'est pas sans conséquence sur leur perception des formalités administratives liées au retour, que 57,5 % trouvent complexes. D'ailleurs plus des trois quarts des expatriés interrogés estiment que les créateurs d'entreprise ne bénéficient pas d'aides suffisantes. Difficile toutefois de faire la part entre le constat et l'opinion.La multiplicité des aides, leur complexité d'accès, et l'image de la France d'un point de vue fiscal, pèsent sur la perception des dispositifs d'aides. Et donc sur la décision des expatriés. L'accompagnement est un point très sensible et les Français de l'étranger ont le sentiment d'un réel déficit dans ce domaine pour trois quarts d'entre eux tant sur le plan professionnel que personnel. Pour ce qui est des expatriés créateurs d'entreprise, seuls 35,8 % pensent qu'ils bénéficient d'un accompagnement particulier, et 34,7 % qu'il existe des réseaux d'appui aux entreprises. Ces résultats traduisent soit un important déficit d'information, soit une mauvaise image de la France. Mais interrogés sur des structures d'accompagnement précises, les résultats sont positifs : ainsi les agences de développement économique ont aux yeux des personnes interrogées un rôle important. Les programmes mis en place comme Home Sweet Home (dans la région Paca) semblent correspondre aux attentes des candidats au retour. Ainsi 82,4 % de ceux qui le connaissent souhaitent son développement. La double approche de proximité et de globalité est appréciée, par exemple la prise en compte des préoccupations professionnelles des deux conjoints... Reste que le dispositif se borne à la région Paca.