La France "out of Africa"

L'acte de décès a été gravé le 7 novembre 2004 lorsque des soldats français ont tiré sur des "patriotes" ivoiriens. La "Françafrique", si chère au défunt président Houphouët-Boigny et mise en place par les "réseaux Foccart" dès la Libération, n'est plus. Lucide et étayé, le constat de deux des plus grands journalistes spécialistes du continent noir est sans appel. La France n'a pas su préserver les relations privilégiées qu'elle entretenait avec ses anciennes colonies et surtout avec ses potentats locaux. Dernier - mais sans doute pas ultime - avatar, la rigidité avec laquelle Jacques Chirac a soutenu contre l'évidence le régime tyrannique togolais. En Afrique (aussi) le chef de l'État français "ne comprend pas" cette jeunesse qui représente pourtant plus des trois quarts de la population. Une population victime - de moins en moins fataliste - de la famine, du sida, des dictatures, des génocides, de la corruption, du chômage, du paludisme... Dévaluation. C'est en 1994, lorsque Edouard Balladur a unilatéralement dévalué de moitié le franc CFA, que le lien jusque-là encore solide s'est rompu brutalement en Côte-d'Ivoire, effiloché au Niger ou en République centrafricaine, relâché même au Sénégal ou au Gabon... Aujourd'hui, "tout se retourne contre la France : Paris intervient, et on dénonce son néocolonialisme, Paris s'abstient, et on lui rappelle sa responsabilité historique". Pas facile donc de maintenir un pré carré puisque l'Afrique est en crise permanente, pas commode d'exister quand on s'est désengagé à contretemps. La rupture paraît définitive car la France s'est retirée financièrement, militairement, culturellement, au moment où les nouvelles générations ont pris le pouvoir, celles qui sont passées par d'autres universités que les hexagonales et qui s'avèrent sensibles au récent déploiement américain. Conclusion : la France ne retrouvera son aura que lorsqu'elle saura identifier une politique en phase avec celle de ses partenaires africains. C'est loin d'être le cas.Jérôme Stern
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