Les papys crooners

Chez eux, au Zimbabwe, on les appelle familièrement les "Old Boys". Abel, Liccan alias "Lucky", Eric "The Duke" et le tout dernier Timothy ont largement dépassé le demi-siècle. Sur scène, depuis peu en Europe et même aux Etats-Unis, ils forment les Cool Crooners, un groupe vocal qui marie le jazz joyeux de Louis Armstrong et Duke Ellington et les accents traditionnels des plateaux de l'Afrique australe.Leurs débuts musicaux remontent à l'époque où le Zimbabwe s'appelait Rhodésie du Sud, colonie britannique dotée d'un gouvernement blanc. Enfants noirs des ghettos, ils donnèrent naissance au Township Jazz Music. Dans les fêtes locales ou les clubs, ils chantaient l'amour, les tracas de la vie quotidienne, des histoires simples mais toujours empreintes d'un entrain communicatif. Cette aventure musicale devait connaître un long - et involontaire - entracte lors de la guerre d'indépendance. Emprisonné dix ans, Abel, libéré en 1980 avec la naissance du Zimbabwe, forme à nouveau un groupe qui rassemble des membres des Cool Four et des Golden Rhythm Crooners. Nos chanteurs de charme, sous le nom de Cool Crooners, se produisent sur les scènes de la région, de l'Afrique du Sud au Malawi et bien sûr à Harare.Tournée. C'est là, dans cette capitale du Zimbabwe, qu'un producteur français de film, Patrick Meunier, les a rencontrés en 1999 à l'occasion d'un tournage (Lumumba, de Raoul Peck). Contact est pris à Paris avec un autre producteur, musical celui-là (Christian Noaille) pour sortir un premier CD ("Blue Sky") qui entraîne une première tournée hors d'Afrique.Dans l'hiver parisien, emmitouflés dans leurs parkas, coiffés de bonnets de laine, Abel, Lucky, Eric et Timothy racontent avec émerveillement leur périple américain, de New York à Los Angeles, la visite à la maison natale de Martin Luther King à Atlanta, l'accueil chaleureux qui leur a été réservé en Géorgie par une chorale de gospel dans une église...En sortant de leurs frontières, les Cool Crooners ont aussi élargi leur répertoire. Leurs propres compositions constituent toujours 80 % de leur récital tout comme cet "Isatilo" ou cricket pèlerin aux effets ravageurs sur les récoltes, qui donne son nom à leur deuxième album. Mais ils donnent aussi leur version, dans leur langue natale, le sindébélé, de la romance éternelle de John Lennon, Imagine. Un titre symbolique. Abel, le septuagénaire, et ses copains, ont encore du mal à imaginer ce qui leur est arrivé.Jean-Louis LemarchandConcerts : A Paris, au Petit Journal Montparnasse, le 1er mars (tél. : 01.43.21.56.70) ; au festival d'Amiens, le 1er avril (tél. : 03.22.97.79.79).Discographie : "The Cool Crooners : Isatilo" avec en invitée Prudence Katomene, vocaliste (Atelier Noaille, Sony Music, 2005).
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