Obligations + Les marchés de taux pourraient se réveiller cet été

Les commentaires, officiels ou pas, ont beau fuser sur le fait que la France aura du mal à atteindre le critère maastrichien de 3 % de déficit sur PIB cette année, le marché obligataire, mais aussi monétaire et de change, reste de glace. Les taux à 10 ans, à 5,58 % hier, sont proches de leurs plus-bas historiques, les taux à trois mois sont stables, sur le niveau de 3,26 %, et le franc reste en lévitation autour de 3,3740 francs pour un mark, avec même une tendance à s'apprécier. S'agit-il du calme avant la tempête ? Les marchés, qui font pour l'instant preuve d'un certain angélisme, se réveilleront-ils à la fin juillet, à l'occasion de l'audit demandé par le nouveau gouvernement ? Ou lors des discussions sur le collectif budgétaire, à la rentrée ? Peut-être. Toujours est-il que le consensus est actuellement à la complaisance. Car certains faits se présentent comme des évidences. « Bien sûr que la France ne sera pas à 3 %, déclare ainsi Jean-Louis Mourrier, économiste chez Louis Dreyfus Finance, mais personne n'y sera. » « L'affaire de l'or de la Bundesbank a entamé la crédibilité allemande, poursuit Patrick Mange, économiste chez Deutsche Morgan Grenfell. S'il faut commencer à adopter une interprétation en tendance des critères pour l'Allemagne, alors, la même chose est valable pour la France. » Annexe du traité. Les opérateurs commencent donc à relire le traité de Maastricht, et s'aperçoivent que le fameux 3 % est dans une annexe et non pas dans le traité lui-même, et que l'article 104c précise qu'il s'agit de réduire le déficit de façon substantielle et constante dans le temps. Encore faut-il maintenant interpréter le mot « substantielle ». Un ratio de 3,5 % de déficit sur PIB pour la France sera sans doute diffi- cile à « vendre » aux Allemands, mais pas forcément un ratio de 3,3 %... Au-delà de ces éléments psychologiques et politiques, les professionnels sur les marchés mettent aussi en avant divers éléments de soutien pour les obligations françaises. A commencer par les flux de liquidités provenant de la collecte de contrats d'assurance vie. « Il y a toujours énormément d'argent à investir, souligne ainsi Raoul Salomon, trader chez BZW à Paris. La preuve, les investisseurs domestiques se précipitent sur toutes les émissions du marché primaire, l'emprunt de l'Italie, il y a quelques jours, pour un montant de 5 milliards de francs, est parti en 10 minutes. Du jamais vu ! » Tarissement de la manne. Mais cette manne, qui a protégé jusqu'à présent le marché obligataire français, sur lequel les investisseurs étrangers sont très peu nombreux, ne risque-t-elle pas de se tarir un jour ? Certains spécialistes évoquent la possibilité, de la part du gouvernement, de « réallouer les taxes », ce qui pourrait équivaloir à une augmentation de la taxation sur les produits d'assurance vie, via un plafonnement de l'exonération des droits de succession. Même si l'impact d'une telle opération ne se fera pas forcément sentir avant la fin de l'année, certains estiment que les taux à 10 ans pourraient se tendre et renchérir d'autant la charge de la dette - et accroître ainsi le déficit. Une situation qui demanderait à l'Etat de faire plus appel au marché, à des taux plus élevés. Un piège qui pourrait ainsi se refermer sur le gouvernement, s'il prend forme... Lysiane J. Baudu
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