ASIE + Les marchés émergents scrutent le baht thaïlandais

Par latribune.fr  |   |  572  mots
La liberté rendue hier à la monnaie thaïlandaise (voir Voir Marchépage 7) a fait la joie de la Bourse de Bangkok, en hausse de plus de 7 %, et précipité le reste des marchés financiers dits « émergents » d'Asie et d'Amérique latine dans une douloureuse incertitude. Après la décision des autorités monétaires de Thaïlande de laisser flotter le baht, la plupart des banques centra les de l'Asie hors Japon ont immédiatement annoncé qu'elles entendent favoriser la stabilité, afin de prévenir toute éventualité de retour d'un « effet tequila », en référence au jeu de massacre pratiqué sur les marchés, lors de l'hiver 1994-1995, à la suite de la dévaluation du peso mexicain. La communauté financière a réagi cette fois-ci avec beaucoup plus de sérénité. La dévaluation de la monnaie thaïlandaise était attendue par de nombreux investisseurs, qui ont pris soin de se couvrir avec des produits dérivés sur le marché des changes. Discerner le bon grain. Partout on remarque que le baht n'a pour l'instant perdu que 18 %... alors que la valeur du peso mexicain avait au contraire fondu de plus de 50 % dans les trois mois qui avaient suivi la décision de la laisser flotter. Avec le temps, les gérants de fonds ont également appris à discerner le bon gra de l'ivraie. Pour la plupart des marchés émergents, l'année 1995, promise à une catastrophe après la crise mexicaine, s'était en fait terminée sur un bilan meilleur que celui de l'année 1994, hypothéquée par le relèvement des taux d'intérêt américains. Retour vers la Bourse. Le baromètre le plus suivi par les marchés émergents reste l'orientation de la Réserve fédérale américaine, qui réunissait hier son comité de politique monétaire, au centre de toutes les discussions. Certains investisseurs estiment toutefois que la dévaluation thaïlandaise risque de mettre la pression sur des pays voisins, comme les Philippines. La Bourse de Manille a perdu hier 1,8 %, tandis que Djakarta (- 0,2 %), Taiwan (- 0,3 %), Singapour (- 0,6 %) et Kuala Lumpur (+ 0,55 %) restaient stables. A Bangkok, la dévaluation a donné le signal du retour vers la Bourse. Dans un volume d'affaires record, l'indice SET a gagné 7,8 %, soit sa plus forte progression quotidienne des cinq dernières années. Le Crédit Lyonnais Asie, qui s'était fait réprimander récemment par la Banque de Thaïlande pour avoir annoncé une baisse de 1 % du PIB en 1997, est en train de revoir à la hausse ses prévisions. « Mais ce sera très inférieur au taux révisé en baisse de 4,8 % » annoncé mercredi par Bangkok, précise-t-il. Toutes les entreprises du pays ne bénéficieront pas de la dévaluation, soulignait hier Mark Mobius, le célèbre gérant du fonds d'investissement américain Templeton. Une société comme Siam Cement détient par exemple 90 % de sa dette libellée en devises, pour un montant d'environ 4 milliards de dollars. Cette dette a augmenté hier de 18 % en une seule journée. Et si les investisseurs financiers se couvrent de plus en plus contre le risque de change, la pratique est beaucoup moins fréquente chez les industriels. Les sociétés industrielles à faible valeur ajoutée, grandes importatrices de matières premières, sont les plus exposées au choc de la dévaluation. Nicolas Thiéry