Les places européennes persistent dans leur pessimisme

Par latribune.fr  |   |  532  mots
L'OUVERTURE en forte baisse de toutes les places boursières européennes, hier matin, n'a pas surpris les investisseurs. Vendredi soir, sur le système électronique Globex, la plupart des marchés européens avaient en effet déjà plus que répercuté l'effondrement de 2 % de l'indice Dow Jones en clôture. Car l'annonce, vendredi, d'une accélération de la hausse des salaires aux Etats-Unis laisse craindre un durcissement plus rapide que prévu de la politique monétaire américaine, ce qui ne manquerait pas de peser fortement sur la croissance économique mondiale, au détriment de l'Europe et de l'Asie. « La banque centrale peut prévenir l'inflation du coût des matières premières en relevant modérément ses taux d'intérêt, note un économiste, mais lorsqu' il s'agit d'enrayer l'inflation par les salaires, il lui faut parfois aller beaucoup plus loin ». A l'horizon de septembre 1997, le marché à terme anticipait hier des taux d'intérêt américains à trois mois de 6,86 % contre 6,54 % vendredi. Sur l'échéance plus rapprochée de septembre 1996, les mêmes anticipations se fixent à 5,93 % contre 5,74 % vendredi. Une réaction qui semble indiquer que la banque centrale américaine, la Fed, n'hésitera pas à intervenir à la veille de l'élection présidentielle du 4 novembre 1996. Une partie des économistes s'attend toutefois toujours qu'elle diffère sa décision de quelques mois, pour ne pas être prise à partie lors de la campagne électorale. Les Européens attendent des taux plus bas Les marchés savent que la croissance américaine finira bien par s'assagir. Ils ont même excessivement spéculé sur ce thème jusqu'en février, lorsque les taux à trente ans sont tombés sous le seuil de 6 %. Mais ils savent aussi que la Fed déteste être prise de vitesse par les statistiques économiques. Il n'est donc pas exclu qu'elle réagisse beaucoup plus durement que prévu, quitte à prendre le risque de contribuer fortement à une entrée en récession en 1997. Les Bourses européennes seraient les plus pénalisées. D'abord parce que la croissance mondiale, privée du moteur américain, risque alors de caler en côte, même si l'Asie du Sud-Est est toujours là. Ensuite parce que les marges bénéficiaires des entreprises européennes sont plus faibles, et donc plus sensibles au niveau de l'activité économique. Enfin parce qu'en Europe entreprises et ménages ont actuellement besoin de taux d'intérêt plus bas, pour s'endetter et investir de nouveau, après des années de récession. L'indice Dow Jones a terminé hier en baisse de 0,67 %, à 5.550,83 points. Pour beaucoup, le marché reste trop spéculatif, car les investisseurs en actions ne tiennent pas encore suffisamment compte du signal donné par les taux à trente ans. A 7,19 % hier contre 6,92 % vendredi matin, le rendement des bons du Trésor à trente ans ne fait que refléter la « prime de risque » normale des placements à long terme. Le jour où une véritable inflation refera surface, « on sera bons pour 8 % », note un opérateur. Quand à la croissance des bénéfices 1996, elle est déjà dans les cours du marché, qui les paie environ 15 fois. NICOLAS THIÉRY