Reconnecter le travail à la vie privée

Réduire l'absentéisme, augmenter la productivité, limiter le turnover, mais aussi, plus en amont du processus contractuel, attirer de nouveaux collaborateurs... Pour répondre aux enjeux majeurs de leur " image employeur ", les entreprises doivent satisfaire des demandes jusqu'alors plutôt inédites et portant sur la définition de meilleurs équilibres entre vie au travail et sphère privée." Les salariés se montrent en attente de tout ce qui peut consolider l'épanouissement personnel, par la recherche d'une juste équation entre des dimensions professionnelle et privée longtemps tenues distinctes ", note Marine de Chanterac, consultante chez Towers Perrin. Les entreprises, dès lors qu'elles intègrent cette demande, vont actionner des leviers divers : horaires aménagés, conciergerie, garde d'enfants, aménagement de la rémunération, ou encore accès à des services de prévoyance.Certains employeurs misent plus directement sur des références immédiatement positives, en allant par exemple faciliter l'accès de leurs collaborateurs aux loisirs. Engagée dans le sponsoring sportif et plus précisément nautique, la société Niji met ainsi chaque été son voilier à disposition de ses salariés, qui le louent via le comité d'entreprise à des tarifs symboliques. Ancré dans le port breton de La Trinité, le bateau peut accueillir une dizaine de personnes. " Les collaborateurs le connaissent bien, car non seulement il porte nos couleurs lors de régates, mais il sert également de lieu de séminaires itinérants entre Houat, Grouin et Hoedic ", explique Hugues Meili, patron de Niji.Quelles que soient les techniques et approches déployées, elles appellent nécessairement une communication blindée. Car les dispositifs les plus courants n'intéressent pas toutes les catégories de personnes. Il faut donc toujours les accompagner d'une légitimation construite, faute de quoi on générera des frustrations. De fait, les formules dites " universelles " se multiplient, censées contenter l'ensemble des salariés, quels que soient leur statut, leur fonction, leur situation familiale. C'est notamment la mode des PAE, ou " programmes d'aide aux employés " : des bouquets de services proposés aux salariés et à leur entourage, portant sur des éléments de confort (nutrition, installation ou utilisation de terminaux numériques), mais aussi sur des dimensions plus personnelles (soutien psychologique, soutien scolaire...).PROGRAMMER DES REUNIONS A L'HEURE DU DEJEUNERIl apparaît néanmoins que la création de passerelles avec la sphère personnelle cible principalement les femmes et notamment les mères de famille. C'est le cas chez Robert Half, qui emploie en majorité des effectifs féminins. " 60 % de nos collaboratrices ont des enfants. Nous avons souhaité mettre en oeuvre des mesures susceptibles de les décharger d'un certain nombre de soucis, afin d'améliorer leur bien-être dans l'entreprise et, de ce fait, d'encourager l'efficacité ", souligne Olivier Gélis, directeur général France, Espagne et Irlande de Robert Half, et lui même père de trois enfants. Au sein de l'entreprise de recrutement, 90 % des réunions sont programmées à l'heure du déjeuner. Ce modèle des brown bag meetings bouscule l'habitude très française des interminables réunions matinales ou vespérales. En cas de force majeure, les briefings n'ont jamais lieu avant 9 h 30 ni après 17 heures. Et commencent impérativement à l'heure. Quant à l'usage d'Internet à des fins personnelles, il est totalement toléré de 12 heures à 14 heures et après 17 heures. Ces conditions de navigation étant stipulées dans une note interne. " Le fait d'officialiser les modalités d'utilisation du Web libère les esprits. Personne n'éprouve le besoin d'aller surfer en catimini en dehors des plages autorisées ", note Olivier Gélis.Parmi les éléments de confort les plus souvent réclamés par les salariés : la souplesse dans l'aménagement des horaires de travail. Une requête entendue par la direction de Robert Half, qui a systématisé la possibilité de négocier un 4/5 de temps. " Les demandes peuvent également porter sur d'autres formules, de type 9/10, mais c'est le 4/5 qui arrange davantage nos collaborateurs ", souligne Olivier Gélis. Chaque demande fait bien sûr l'objet d'une étude de la DRH, qui s'engage à donner une réponse - généralement positive - dans la semaine.Aujourd'hui, 20 % des salariés de Robert Half travaillent ainsi en temps partiel. La plupart d'entre eux s'octroyant la journée du mercredi pour pouvoir se consacrer à leur progéniture. Ne nous y trompons pas, l'entreprise sort également gagnante. " Nous avons constaté, à l'euro près, que cette réduction du temps de travail n'altérait en rien la productivité, précise le DG. Nous avons créé de la responsabilité et de la confiance et limité le turnover à 3,5 %. "Les salariés français sévèresL'organisation est le levier déterminant de rétention des salariés. C'est ce qui transparaît d'une étude menée par le cabinet-conseil Towers Perrin en mai et juin 2007 auprès de 88.000 salariés dans 18 pays. Très sensibles aux efforts menés pour créer des passerelles entre vie professionnelle et sphère privée, les Français citent le lieu de travail et la souplesse des horaires aux quatrième et sixième rangs des vecteurs d'engagement. Le sentiment général traduit une faible préoccupation des directions quant aux éléments de facilitation de la vie des salariés. Seuls 22 % des Français (29 % pour l'Europe) estiment que leur entreprise se soucie réellement de leur satisfaction et de leur bien-être.
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