Bien gérer son staff dans les zones sensibles

Le plus stressant, c'est sans doute tout ce qui relève de l'incertain, de l'aléa, de l'accident. On sait que le risque est présent, on ne sait pas précisément quand il peut s'exprimer, ni de quelle manière. " Fabien Poggi est directeur commercial à l'export de Sage, éditeur de solutions de gestion des ressources humaines. Il gère en direct une équipe " export " d'une vingtaine de collaborateurs travaillant essentiellement en vente indirecte dans des zones " sensibles ". " Nous travaillons dans une problématique de gestion des risques humains ", résume-t-il. Chaque collaborateur en charge de la stratégie export passe sur le terrain une dizaine de jours par mois, à raison de séjours de deux ou trois jours par pays visité. Comme toutes les entreprises qui ont développé une activité structurante en matière d'export, Sage est en contact régulier avec les compagnies d'assurances, les compagnies aériennes, les autorités diplomatiques. Mais également, principe de précaution oblige, avec des sociétés de sécurité dans les différents pays quadrillés par la force de frappe commerciale.L'AGE N'EST PAS UN CRITEREL'entreprise a intégré un certain nombre de mesures pratiques : " J'ai banni certaines compagnies aériennes - toutes les russes -, j'interdis souvent la location de voitures et il m'arrive de proscrire les taxis locaux ", précise Fabien Poggi. Un dispositif qui a permis à l'entreprise de ne jamais connaître le pire, malgré quelques vraies frayeurs : un collaborateur pris sous des feux croisés à un barrage policier au Tchad, un autre présent lors du coup d'État de 1999 en Côte d'Ivoire. Chez Sage, on reconnaît porter un soin tout particulier au recrutement des collaborateurs en charge de la stratégie export.Par-delà les critères techniques et le savoir-faire métier, le paramètre comportemental résonne avec acuité. " L'âge joue peu. J'ai recruté des seniors qui n'avaient pas voyagé, mais qui témoignaient d'un savoir-être à toute épreuve ", note Fabien Poggi. Il s'agit bien sûr de s'assurer de l'ouverture d'esprit, du sens des responsabilités et du sang-froid de chacun. Et pas seulement pour gérer les coups durs extrinsèques à l'environnement de l'entreprise (tensions politiques, insécurité civile, dangers sanitaires). Car, in fine, l'un des risques majeurs auxquels les commerciaux export ont à faire face procède de la nature même de leur mission et du contexte commercial où elle s'exerce. L'export met en permanence les individus en tension (contextes commerciaux, juridiques, sécuritaires, sanitaires, pratiques, domestiques).Loin du siège, lorsqu'on doit composer avec des habitudes et des pratiques commerciales qui peuvent aller à l'encontre des objectifs d'efficacité, voire des règles déontologiques de l'entreprise, il est nécessaire de savoir faire preuve de maturité, d'autorité et de désintéressement. " Parce qu'ils sont autonomes, hyperactifs, curieux, les responsables export seront peut-être plus spontanément tentés d'éprouver les processus de l'entreprise. En toute bonne foi, avant tout pour faire évoluer le modèle ", affirme le directeur commercial, qui reconnaît avoir dû se séparer de certains collaborateurs, dont un responsable de zone. L'encouragement d'une posture commerciale des plus strictes dans des environnements aux repères variés et parfois mouvants, cela se paie. " Le modèle de rémunération est sans doute plus individualisé que pour celui de commerciaux sédentaires ", souligne Fabien Poggi." EVITER L'USURE"À statut particulier, systèmes de gratification actionnant davantage de paramètres : primes variables individuelles et d'équipe, primes de qualité, primes exceptionnelles. Le " savoir-être " apparaît comme le critère clé d'un processus de recrutement et d'accompagnement blindé à l'extrême : entretiens poussés et démultipliés à cinq ou six éditions, confrontation avec plusieurs responsables de l'entreprise. Un " savoir-être " qui doit transcender jusqu'aux penchants - bien légitimes - culturels ou touristiques des candidats. " Si on me demande rapidement au fil de l'entretien quels sont les pays à couvrir, c'est pour moi un signal négatif d'alerte. Je considère l'export comme un métier au service d'une collectivité et non comme un tremplin touristique ", explique le directeur commercial.Illustration de cette prégnance communautaire : chacun des sept responsables de zones de l'équipe export est en charge d'un pays d'Afrique. Une manière d'encourager chez chacun un état d'éveil culturel et en même temps de maintenir une communauté d'esprit au sein de l'équipe. Et tous les deux ans, l'ensemble des affectations est remis sur la table. " Il faut éviter l'usure, pour mieux garantir l'intégrité. "
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