Spéculation : Bruxelles met de l'eau dans son vin

La Commission européenne a finalement dit à Nicolas Sarkozy ce qu'il voulait entendre, ou presque. « Il est clair qu'il y a une corrélation forte entre les positions prises sur les marchés dérivés et les prix des matières premières elles-mêmes », a reconnu l'exécutif européen dans un rapport présenté mercredi à Bruxelles. La semaine dernière, le chef de l'État n'avait pas caché son agacement devant la frilosité de la Commission à établir formellement, faute de données, un lien entre spéculation et volatilité des prix. La version initiale du document soutenait qu'« il n'y a aucun élément probant qui atteste d'un lien de causalité entre l'activité des marchés des produits de base et des matières premières ». Or la présidence française du G20 a besoin du soutien de l'Europe dans sa volonté de lutter contre la spéculation. Nicolas Sarkozy a donc contraint la Commission à revoir sa copie. Pour autant, la nouvelle formulation a été choisie de manière à satisfaire le président français sans renier la doctrine bruxelloise. « Corrélation » ne signifie pas « causalité », et le rapport, qui n'emploie pas le mot « spéculation », s'empresse d'ajouter qu'« il est toujours difficile d'évaluer complètement les interactions et l'impact des mouvements des marchés dérivés sur la volatilité des marchés physiques sous-jacents ». Opacité des marchésEn clair, le document dit la même chose, mais différemment. Avec à l'appui un communiqué de presse sous forme de mandat qui aurait pu être rédigé directement à l'Élysée : « La Commission appelle à agir sur les matières premières. » Le ministre de l'Agriculture, Bruno Le Maire, s'est aussitôt dit « soulagé de voir que la Commission a évolué sur ce sujet et a reconnu la part de la spéculation » dans l'accroissement de la volatilité des prix. C'est l'opacité des marchés qui est au coeur de ce débat sur « le sexe des anges », selon l'expression de Bruno Le Maire, opposant l'intime conviction de Paris au besoin de preuves de Bruxelles. Michel Barnier, le commissaire européen en charge des Services financiers, veut établir des règles pour savoir qui fait quoi sur les marchés : « La transparence que nous voulons généraliser, c'est la clef : une fois qu'il y aura cette transparence, les abus seront limités. » Yann-Antony Noghès, à Bruxelle
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