Génériques : la bataille fait rage entre les labos

Le générique ne connaît pas la crise. À l'heure où le scandale Mediator ébranle l'industrie pharmaceutique, les ventes de ces « copies » légales de médicaments, dont le brevet est tombé dans le domaine public, ont bondi de 10,4 % en 2010. Elles ont rapporté 2,6 milliards d'euros de chiffre d'affaires à leurs fabricants en France l'an dernier, selon les chiffres du secteur que s'est procurés « La Tribune ». Un dynamisme bien supérieur au petit 1,1 % de hausse du marché français total des médicaments, estimé à 27,2 milliards. En 2010, près d'une boîte de médicaments remboursables sur quatre était un générique. « C'est encore loin des scores de nos voisins européens, mais nous espérons les rattraper à terme », indique-t-on au Gemme, le syndicat des génériqueurs. Dans les pharmacies allemandes, trois boîtes de médicaments sur quatre sont des génériques, 70 % au Royaume-Uni.Quinze ans après leur lancement, les génériques conservent des zones d'ombres. « Certains industriels pratiquent des rabais dépassant les seules remises faciales, à l'image des marges arrière de la grande distribution », souligne Patrick Biecheler, consultant chez Roland Berger. Officiellement, les remises faites au pharmacien (17 % maximum du prix d'un générique) doivent figurer sur la facture. Mais les industriels consentent souvent des rabais aux officines en échange, par exemple, de la mise en avant d'une gamme de produits. Tous les coups sont permisConséquences : le marché est très accroché, et la concurrence, féroce. En France, l'américain Mylan conserve la tête du classement avec près du tiers du marché, suivi par le français Biogaran, filiale de Servier, loin devant l'israélien Teva, pourtant leader mondial. Winthrop (Sanofi) est repassé devant Sandoz en 2010. Et tous les coups sont permis. Certains industriels laissent entendre aux pharmaciens que la copie de leur propre médicament est mieux faite par eux-mêmes que par les confrères... Fin 2009, Teva a saisi l'Autorité de la concurrence en dénonçant « des pratiques [de Sanofi] visant à limiter le développement [...] des génériques du Plavix, en usant de sa position dominante ». L'instruction se poursuit sur le fond.Autre « particularisme » hexagonal : le Doliprane de Sanofi n'est pas substituable chez le pharmacien lorsqu'il est prescrit par un médecin. Seuls 6 centimes d'euro séparent une boîte de Doliprane (1,74 euro) d'un paracétamol générique, fait valoir le labo. Mais avec 80 % des volumes vendus sur ordonnance, il y trouve son compte : le Doliprane génère 170 millions d'euros par an. En dépit de ces arrangements, le marché des génériques a de beaux jours devant lui. « Il va continuer à croître de 10 % par an dans les prochaines années », estime Patrick Biecheler. Tous attendent les génériques des blockbusters qui tombent dans le public (Lovenox, Plavix...) mais aussi les « biosimilaires », copies de médicaments biotech désormais autorisées en Europe. L'anticancéreux Avastin de Roche pourrait en faire les frais dès 2012. Résultat : les labos traditionnels chassent sur les terres des spécialistes. Pfizer, qui s'est fait souffler Ratiopharm par Teva, cherche toujours des cibles. Tout comme Sanofi, qui compte remplacer sa marque Winthrop par Zentiva. « L'industrie pharmaceutique ne peut plus se permettre de laisser échapper ses génériques », résume Patrick Biecheler.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.