La grogne monte en Allemagne autour des baisses d'impôts

Par latribune.fr  |   |  523  mots
FISCALITÉDécidées voici à peine plus d'une semaine, les baisses d'impôts suscitent déjà beaucoup de réticences en Allemagne. Dans les Länder, on s'inquiète de ce projet qui prévoit de réduire la charge fiscale de 24 milliards d'euros par an à partir de 2011. Le chef du gouvernement de Saxe, Stanislaw Tillich, pourtant membre de la CDU d'Angela Merkel, a ainsi prévenu que des « baisses d'impôts à crédit seraient irresponsables ». D'autres ministres-présidents issus de la CDU ont tiré la sonnette d'alarme, en Sarre, en Thuringe, à Hambourg ou en Saxe-Anhalt. Ce dernier Land n'a d'ailleurs pas exclu de porter l'affaire devant la Cour constitutionnelle de Karlsruhe. Les Länder, qui ont déjà vu leurs situations budgétaires se dégrader avec la crise, craignent de devoir payer le prix fort pour ce projet. En Allemagne, les recettes fiscales sont redistribuées entre État fédéral, Länder et communes. Les collectivités territoriales, qui récupèrent 60 % du total, vont donc financer en partie les promesses fiscales du gouvernement fédéral. Cette levée de boucliers n'est pas anodine, car l'accord des Länder, représentés au Bundesrat, sera nécessaire pour voter la loi fiscale. Si les sondages récents se contredisent quant à l'état de l'opinion publique sur le sujet, le projet gouvernemental doit aussi faire face à un scepticisme croissant dans les milieux économiques. Hans-Peter Keitel, le président de la puissante fédération de l'industrie allemande, la BDI, a jugé ce week-end, que « la consolidation budgétaire est plus importante que les baisses d'impôts ».marge de man?uvre réduiteCe débat intervient alors que l'on attend cette semaine les estimations officielles de recettes fiscales pour 2009 et 2010. Elles devraient encore apporter de l'eau au moulin des opposants aux baisses d'impôts. Selon le « Handelsblatt », malgré l'amélioration conjoncturelle actuelle, les rentrées fiscales pour cette année ne dépasseraient pas 523 milliards d'euros, soit un recul de 4 milliards d'euros par rapport aux précédentes estimations du printemps. En 2010, ces recettes pourraient encore reculer de 6 milliards d'euros. C'est dire si la marge de man?uvre du gouvernement est réduite.Hier, dans une interview au « Handelsblatt », le ministre fédéral des Finances, Wolfgang Schäuble, a certes défendu le projet fiscal du gouvernement, mais il s'est voulu très ferme : le déficit devra être réduit dès 2010, et les obligations européennes et constitutionnelles, respectées. Du coup, conclut-il, « il faudra commencer la consolidation budgétaire par les dépenses ». Il y aura donc bien une contrepartie aux cadeaux fiscaux. Mais, surtout, Wolfgang Schäuble a prédit que, d'ici à 2013, aucune réforme structurelle de l'impôt sur le revenu ne verra le jour. C'est une pierre dans le jardin des libéraux qui avait arraché lors des négociations de coalition la possibilité à partir de 2011 d'une refonte du système fiscal dans le sens d'une progressivité par paliers et non pas linéaire comme aujourd'hui. Décidément, les beaux projets fiscaux du gouvernement allemand ont déjà du plomb dans l'aile. n