Pourquoi Accor change de tête

Gilles Pélisson quitte Accor. Cinq ans après avoir succédé à Jean-Marc Espalioux, le neveu de Gérard Pélisson, l'un des deux cofondateurs du groupe hôtelier, cède sa place de numéro un à un ami, Denis Hennequin, patron de McDonald's en Europe qu'il avait fait entrer à son conseil d'administration en 2009. Réunis mardi 2 novembre, le conseil et Gilles Pélisson ont « fait le constat de divergences stratégiques qui les ont conduits à organiser [son] départ », indique un communiqué du groupe.Des divergences stratégiques ? Mais lesquelles ? Contacté par « La Tribune », Accor refuse d'expliciter les raisons réelles de ce départ. « Accor aborde une nouvelle phase de son développement, durant laquelle la détermination des priorités et leur exécution seront des facteurs clés de succès pour Accor », avance le communiqué du groupe aux 4.100 hôtels et 500.000 chambres dans le monde. Eurazeo, qui détient avec le fonds américain Colony Capital 27,36 % du capital, n'a pas voulu commenter ce départ. Malgré cela, des yeux accusateurs se tournent vers ces deux fonds d'investissement qui, depuis leur entrée au capital d'Accor en mars 2005 et l'obtention de 4 des 11 sièges du conseil en 2009, au grand dam du président d'alors, Serge Weinberg, ont dicté à son patron sa stratégie, trimestre après trimestre. « Détrompez-vous, la décision de mettre fin au mandat de Gilles Pélisson a été prise à l'unanimité du conseil », nuance un administrateur. Et elle couvait depuis début 2010.Jusque-là, Gilles Pélisson paraissait pourtant jouer parfaitement le rôle d'exécutant que lui soufflaient les actionnaires. En mars 2006, tout juste nommé à la tête d'Accor, il signe la première de ses multiples cessions. Pour 953 millions d'euros, il vend les murs d'une centaine d'hôtels. D'emblée, il satisfait le mandat d'investissement de Colony Capital, un fonds spécialisé dans le foncier. Gilles Pélisson enchaîne sur la vente de la participation d'Accor dans Club Med, puis cède, entre autres, Carlson Wagonlit et Go Voyages. Les actionnaires sont choyés par des distributions de dividendes.Besoin d'un visionnaireToujours sur leurs ordres, Gilles Pélisson devra ensuite scinder le groupe en introduisant en Bourse ses activités de services, dont TicketRestaurant, véritable vache à lait. « Pélisson n'était pas favorable à la scission d'Accor », observe un analyste financier. Il n'empêche. La nouvelle société Edenred sera cotée en juillet 2010. Vient alors le projet d'introduction en Bourse de Lucien Barrière, le groupe de casinos dont Accor détient 49 %. Et son échec. Accor, qui avait proposé une fourchette de 16,10 à 19,6 euros par titre Barrière, s'est ravisé au dernier moment, faute de trouver preneurs. « Ce n'est pas ce qui a déclenché son départ, car cet échec est une faute collective », assure un membre du conseil.Alors pourquoi le soldat Gilles Pélisson a-t-il été sorti du rang ? En fait, les actionnaires d'Accor éprouveraient le besoin d'avoir un vrai stratège à sa tête. Il y a peu, ils auraient pris conscience du manque de vision de Gilles Pélisson « face à ce qui doit être fait dans le cadre du nouveau profil du groupe ». Notamment lors de choix de partenaires ou d'élaboration de stratégie de gamme pour ses 17 enseignes.Accor est le numéro quatre mondial de l'hôtellerie derrière InterContinental, Marriott et Starwood. Or, d'ici à 2015, le français brigue la place de numéro trois. Il doit profiter du rebond du marché et d'une expansion à moindre coût, sous le mode de la franchise. En « vitesse de croisière », Accor veut ouvrir pas moins de 35.000 à 40.000 chambres par an. Or, Denis Hennequin est, lui, un spécialiste de la franchise. « Mais, il devra aussi relancer le dossier Lucien Barrière en trouvant un investisseur », prévient un proche.
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