L'adieu au modèle Bundesbank

On présente souvent la Bundesbank comme la référence de la BCE en termes de politique monétaire. Mais cette analyse ne semble plus de mise. Selon Jörg Krämer, économiste en chef chez Commerzbank, la BCE s'est, depuis l'an dernier et pour la première fois, nettement distinguée de l'orthodoxie monétaire allemande par sa politique de taux bas. L'économiste a reconstitué un « modèle Bundesbank » à partir des éléments de croissance, de compétitivité et d'inflation. En comparant ce « taux idéal de la Buba » avec le taux européen à 3 mois, on constate, entre 1999 et 2010, que les deux courbes se superposent presque parfaitement. Seules les suites du 11 septembre 2001 créent, pour peu de temps, un écart de moins de 2 points. Mais à partir du printemps 2010, les deux courbes divergent nettement. Le taux du « modèle Bundesbank » s'envole pour atteindre 5 % ! Même si Jörg Krämer reconnaît qu'un autre modèle conclut à un « taux Buba » à 3 %. Dans les deux cas, la BCE s'est clairement démarquée de son modèle allemand. « Les taux actuels sont beaucoup trop bas pour l'Allemagne », juge-t-il, n'excluant pas, à moyen terme, un risque de « surchauffe » de l'économie allemande. Selon lui, le risque inflationniste est plus élevé outre-Rhin que dans le reste de la zone euro. Du fait de la forte croissance, du recul du chômage et de la pression sur les coûts des entreprises provenant des prix à l'importation (en hausse de 12 % sur un an, en février). Il estime que la forte croissance allemande de 2010 (3,6 %, soit 1,9 point de plus que la moyenne de la zone euro) et de 2011 (attendue au-delà de 2,5 %) s'explique en partie par la politique accommodante de la BCE. Cette dernière « mène une politique de soutien aux pays périphériques, elle devrait au minimum adapter sa politique à la moyenne de la zone euro pour stabiliser la situation en Allemagne », conclut -il. Autrement dit, le relèvement du taux directeur d'un quart de point risque de n'être, vu d'Allemagne, qu'un pas insuffisant, quoique positif.Romaric Godin, à Francfort
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