Niches fiscales : et comment font les autres ?

A l'instar du camembert au lait cru moulé à la louche, le goût français pour les niches fiscales est-il une exception française ? De premier abord, non pas du tout. En Allemagne, aux Pays-Bas, aux Etats-Unis, au Canada, en Italie ou en Suède, on use aussi de ces dispositifs qui mitent les impôts, que ce soit l'impôt sur le revenu, celui sur les sociétés ou la TVA. Si la dépense fiscale -- nom technocratique de la niche -- séduit, c'est qu'elle peut aussi être un excellent levier de politique économique. Mais en période de crise économique et de creusement des déficits, ces niches représentent un enjeu budgétaire parfois considérable. La France n'est d'ailleurs pas le seul pays d'Europe à annoncer son intention de faire des économies en réduisant voire en supprimant certaines de ces dépenses fiscales afin de trouver 5 milliards d'euros d'économies en 2 ans. Le Portugal a fait aussi de la réduction de ces niches l'un des axes de son plan de rigueur.Le génie français de la nicheLa singularité française -- car il y a tout de même bien un génie français dans la niche -- réside plutôt dans la pratique que nos gouvernements. Selon une étude de l'Ifrap, "la France est le pays du G7 qui compte le plus grand nombre de dépenses fiscales". Bercy, dans les documents budgétaires, dénombrait 468 dépenses fiscales ayant un impact budgétaire en 2010 chiffré à 75 milliards d'euros. Même si le périmètre des "niches" varie selon les pays, on peut noter qu'en Allemagne et aux Pays-Bas le nombre de niches est près de 5 fois inférieur. Au Etats-Unis et en Grande-Bretagne, le nombre de dépenses fiscales est également moins élevé qu'en France, respectivement 157 et 384 mais leurs coûts pour les finances publiques est bien plus élevé. 668 milliards d'euros outre-Atlantique et 227 milliards d'euros au Royaume-Uni. Le choix politique qui a été fait semble avoir été fait dans ces deux pays est donc celui de concentrer les forces sur une série plus réduite de dispositifs dans l'idée d'optimiser l'impact économique quand la France a cédé aux sirènes du saupoudrage... 16 niches comptent pour 50% du coût totalUne critique que l'on peut néanmoins nuancer par l'observation que 16 dépenses fiscales représentent à elles seules plus de 50% du coût total des dépenses fiscales (37,4 milliards d'euros). Plus que les sommes en jeu ou le nombres de niches, la question qui se pose au moment où la France se livre à un réexamen de ces dispositifs est de connaître la destination des fonds que le contribuable ne verse pas au fisc. Vont-ils soutenir la création d'emploi ou la création de richesse ou non ? Ainsi les dispositifs censés doper l'investissement outre-mer ont souvent été critiqués car ils ont raté leur cible tout en bénéficiant essentiellement à de très riches contribuables.Enfin, même si l'heure semble à mieux contrôler la prolifération des niches, le message a parfois du mal à passer. Lors du récent débat à l'Assemblée sur le Grenelle 2, des députés de la majorité avaient déposé un amendement visant à créer une incitation fiscale pour les propriétaires de bateaux équipés de toilettes. L'idée était d'aider financièrement les propriétaires à mettre aux normes leurs navires en les dotant d'installations capables de stocker ou de traiter "les eaux usées de ces toilettes". Finalement, les élus ont renoncé à leur projet et retiré cet amendement avant qu'il ne soit discuté.
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