Une hausse des taux coûteuse aussi pour la France

Les yeux rivés sur son écran Bloomberg, Xavier Muscat surveille à chaque instant l'évolution des taux sur les emprunts de l'État français. Car le directeur du Trésor sait qu'en 2009 et 2010, leur forte baisse avait permis d'à peu près stabiliser la charge de la dette de l'État, et de masquer la hausse spectaculaire de son stock de dettes (1229 milliards d'euros à fin 2010, toutes échéances confondues). Or cette fois, à l'augmentation continue du volume de dettes va s'ajouter la hausse, beaucoup plus rapide que ne l'avait prévue Bercy, des taux longs depuis la fin août 2010 : à 3,66 % hier, les taux sur les OAT français à dix ans sont déjà très au-dessus de l'hypothèse ultra-optimiste de 3 % pour la fin 2011, retenue dans la loi de finances 2011. Une hausse qui va coûter fort cher au budget de l'État. Sachant que la maturité moyenne de la dette de l'État français est, hors dette à court terme, de 8 ans et 5 mois, la hausse du taux des obligations à (OAT) à 8 ans, passés de 2,20 % au 31 août à 3,30 % hier, va mécaniquement renchérir, dès 2012, sa charge d'intérêts. Cette année, le Trésor a prévu d'émettre 184 milliards d'obligations à long et moyen terme. La hausse des taux observée depuis la fin août coûtera 2 milliards de plus par an à l'État. Soit une petite moitié de l'ISF récolté en 2010... Sur la durée totale de ces emprunts sur 8 ans et 5 mois, leur coût augmentera donc, de 16,8 milliards qui viendront, dans un deuxième temps, gonfler encore le stock de dettes ! Effet boule de neigeCertes, à supposer que les taux longs se stabilisent, cela n'augmentera que d'un petit 5 %, à partir de 2012, les charges brutes d'intérêts payés chaque année qui s'élèvent à 41,8 milliards. Cela ne change donc pas fondamentalement l'équation. D'autant que Bercy table sur une nouvelle baisse du coût moyen brut du stock de dettes: alors qu'il était encore de 4,48 % en 2008, il est descendu à 4,06 % en 2009, puis à 3,78 % en 2010. Pour 2011, le budget table encore sur 3,69 %. Seulement, si l'inertie des stocks de dettes à très long terme maintient le coût moyen de la dette encore bas, on arrive dans une zone où le coût des nouveaux emprunts pourrait dépasser celui des dettes anciennes. Or quand on remplace de vieux emprunts par des dettes plus onéreuses, on déclenche l'effet boule de neige de la dette... « Avec à la fois la hausse des taux et une augmentation de l'endettement, la charge de la dette risque encore d'augmenter lourdement en 2012 et 2013 » estime Cyril Regnat, stratégiste taux chez Natixis.
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