« Il y aura plus de primes à collecter en Europe qu'en Asie dans les cinq ans. »

Entre Asie et Europe le coeur des assureurs britanniques balance. Andrew Moss, à la tête d'Aviva, a choisi l'Europe. Tidjane Thiam, ancien directeur de l'Europe pour Aviva, aujourd'hui patron de Prudential a opté pour l'Asie en lançant une offre de 35 milliards de dollars sur AIA, la branche asiatique de AIG. Chiffres à l'appui, Andrew Moss défend la justesse de sa stratégie. En 2009, Aviva a dégagé un résultat net de 1,3 milliard de livres (1,4 milliard d'euros), après une perte de 885 millions en 2008. Les profits proviennent à 90 % de l'Europe et seulement à 5 % de l'Asie. L'assureur ne veut toutefois pas avoir l'air de se désintéresser d'un continent que d'aucuns jugent si prometteur. Il a annoncé, en fin de semaine dernière, le lancement d'une activité d'assurance auto en ligne à Singapour, une offre inexistante jusqu'alors dans ce pays. Des assurances habitation et voyages devraient suivre ainsi que d'autres développements dans des pays de cette zone. Le groupe signe ainsi son retour en assurance dommages en Asie d'où il était parti il y a cinq ans (« La Tribune » du lundi 12 avril). Aviva est également présent sur ce continent en assurance-vie, où il a réalisé 4?% de son chiffre d'affaires en 2009, soit environ 1,5 milliard d'euros. La France reste le deuxième marché du groupe en Europe, après le Royaume-Uni, avec 6,7 milliards d'euros de chiffre d'affaires (en hausse de 13 %) dont près de 5 milliards en assurance vie, épargne retraite, pour 390 millions d'euros de résultat net. Vous venez d'annoncer votre retour dans l'activité dommages en Asie par le biais d'Internet. L'assurance directe présente-t-elle un potentiel de croissance important ?Oui, même si cela dépend des marchés. Par exemple, nous avons lancé fin mars une activité d'assurance auto en direct à Singapour dont j'ai hâte de voir les résultats. Sur certains marchés, comme Royaume Uni, la vente en direct a révolutionné les pratiques de souscription en assurance auto et habitation. C'est incontournable, et en même temps nous tenons à garder d'étroites relations avec un grand nombre de courtiers, car au bout du compte, c'est le client qui décide par quel canal il veut souscrire. Malgré cette relance en Asie, l'Europe reste-t-elle le centre de votre stratégie ? Oui, depuis dix ou quinze ans, Aviva a identifié l'Europe comme la région de forte croissance en assurance vie et retraite. Nous avons beaucoup investi durant cette période. La raison est simple : les Européens ont de l'argent, ils épargnent et ils ont besoin d'épargner davantage. Si vous regardez les statistiques : le stock d'épargne représente 8.000 milliards de dollars. Les perspectives de croissance sont de 1.700 milliards dans les cinq prochaines années. Si vous le comparez à l'Asie, le stock est de 1.500 milliards et la croissance est de 1.400 milliards. Donc, en pourcentage, la croissance sera plus rapide en Asie mais en volume, il y aura plus de primes à collecter en Europe. Et nous sommes bien placés pour en profiter, puisque nous avons une position solide dans les plus grands marchés du Continent. Vos concurrents comme Prudential ont donc tort de miser sur l'Asie ?Nos concurrents font d'autres choix. En ce qui nous concerne, nous sommes très clairs : nos forces sont au Royaume-Uni et en Europe continentale. Cela ne signifie pas que nous ne construisons pas des positions aux Etats-Unis et en Asie-Pacifique mais nous misons sur le long terme et sur la croissance organique. La concurrence est cependant plus aiguë en Europe...Je n'en suis pas convaincu. Prenons l'exemple de la Chine. Les acteurs locaux y contrôlent 95 % du marché vie, et je pense que cela va perdurer dans un avenir prévisible. C'est un mythe de dire que ce marché n'est pas compétitif. Et comment voyez-vous la croissance d'Aviva à plus longue échéance, sur les dix prochaines années ?L'Europe restera un marché très intéressant. Cela dit, nous n'oublions pas l'Asie-Pacifique, où nous sommes présents dans neuf pays. Nous venons de nous lancer sur le marché indonésien et nous préparons l'avenir, notamment où Chine où nous sommes déjà le troisième assureur vie étranger. La rentabilité de ces activités est encore faible par rapport à celle de nos marchés matures en Europe. Cela va changer avec le tempsLa réorganisation récente juridique et fonctionnelle de vos filiales européennes est-elle une anticipation des nouvelles exigences de fonds propres des normes Solvabilité 2 ?L'efficacité de l'utilisation du capital est une partie de l'objectif. Avec notre projet « saut quantique » nous voulons surtout identifier les meilleures pratiques afin d'opérer aussi efficacement que nous le pouvons sur chacun des marchés où nous sommes présents. Par exemple en Espagne, cela nous coûte 7 euros de faire de la prévoyance alors que cela nous coûte 70 euros en Irlande pour le même type d'affaires. Nous pouvons donc gagner en efficacité. Seriez-vous prêt à des acquisitions si les banques se désengageaient de l'activité d'assurance sous la contrainte des nouvelles normes Bâle 3 ?Il y aura peut-être des modifications dans la structure de nos 43 partenariats de bancassurance et il y aura peut-être des opportunités d'acquisitions. Nous regardons très attentivement, sans nous presser, car il est possible que la fourniture d'assurance excède la demande. Cela aurait alors des conséquences sur les prix de ces acquisitions. Donc c'est le moment de regarder et d'attendre. Nous n'avons pas encore toutes les réponses. Vous avez pris des décisions de réductions des coûts drastiques l'an dernier, cela reste-til votre priorité ? Notre priorité en 2010 ne sera pas la réduction des coûts. En 2009 nous avons atteint notre objectif de réduction des coûts, fixé à 500 millions de livres, avec un an d'avance, ce qui nous permet de viser une croissance rentable. L'opportunité maintenant est de faire croître notre volume d'affaires au travers de plates-formes plus efficaces. Nos équilibres vont se modifier en 2010 et cela viendra des comportements des clients. Je pense que nous avons connu le point bas en termes de ventes d'assurance vie. Des indices montrent que les consommateurs reviennent vers l'épargne.
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