Faut-il revaloriser les tarifs des médecins ?

Par latribune.fr  |   |  779  mots
Le chemin est encore loin pour équilibrer les comptes sociaux. La semaine dernière, le gouvernement a annoncé que le déficit de la Sécurité sociale atteindrait 14,7 milliards d\'euros pour le régime général cette année, compte tenu des mesures correctives prises par le gouvernement sur le budget. A lui seul, le déficit de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM) devrait s’élever à 6,7 milliards d\'euros.Pour résorber le trou de l’assurance-maladie, le gouvernement a des idées. Les dépassements d’honoraires des médecins sont notamment dans le viseur, en particulier ceux pratiqués par les médecins du secteur 2 qui facturent à leurs patients un tarif supérieur à celui remboursé par la Sécurité sociale. Le montant moyen des dépassements a atteint 54% du tarif de la Sécu en 2011, contre 25% en 1990, avec de grandes disparités selon les départements (150% à Paris). Environ 40% des médecins spécialistes installés en libéral en pratiquent alors que les généralistes sont moins concernés.Un accès aux soins de plus en plus difficileSelon Marisol Touraine, la ministre de la Santé, les dépassements d’honoraires ont plus que doublé entre 1990 et 2010, passant de 900 millions à 2,5 milliards d\'euros. Ce phénomène aurait créé de « véritables entraves à l\'accès aux soins\", a-t-elle déclaré ce jeudi sur Europe 1.Trois options sont à l’étude. Le bâton, la négociation ou la réflexion…Dans un premier temps, Marisol Touraine souhaite la mise en place d\'une procédure plus dissuasive pour sanctionner et \"nterdire\" les dépassements d\' honoraires abusifs des médecins, jugeant que le Conseil de l\'Ordre dont c\'est le rôle \"ne le fait pas\".De nouvelles négociations sont prévuesEngagées par le gouvernement, des négociations s\'ouvriront le 25 juillet entre l\'assurance maladie, les syndicats de médecins et les complémentaires, c\'est-à-dire les assurances, les mutuelles, les instituts de prévoyance pour trouver des solutions permettant d’encadrer les dépassements d\' honoraires en secteur 2 où les honoraires sont libres. En clair, il s’agirait de réussir là où Xavier Bertrand, son prédécesseur rue de Grenelle, a échoué. Les négociations n’ayant abouti à aucun résultat, Xavier Bertrand avait pris des mesures qui ont finalement fait l’unanimité contre elles. Marisol Touraine ayant déjà prévenu qu’elle aurait recours à la loi si les prochaines négociations devaient échouer. Il y a comme un air de déjà-vu…De leur côté, les mutuelles préféreraient que le gouvernement commence par revaloriser les tarifs pratiques dans le secteur 1, c\'est-à-dire par les généralistes, afin de combler les écarts avec le secteur 2. Le tarif de l’acte est actuellement de 23 euros. En comparaison des tarifs pratiqués en Europe et le reste du monde, celui-ci est bas, comme le précise une récente étude l’OCDE. « Les tarifs ont été très longtemps bloqués au début des années 90. Dans une logique court-termiste, les gouvernements de l’époque ont pensé qu’un blocage des tarifs permettrait de contenir les dépenses de santé. Résultat, le nombre des actes a explosé et les étudiants ne veulent plus devenir généralistes », explique Annie Chicoye, directeur exécutif du développement à l’Essec. .« Revaloriser le secteur 1 serait un moyen efficace de limiter les dépenses de santé. On estime que 35% des actes de médecins sont inutiles », rappelle Philippe Mixe, le président de la Fédération nationale indépendante de mutuelles. « Si les médecins généralistes étaient mieux payés, ils feraient moins d’actes mais ils passeraient plus de temps avec leurs patients, favorisant notamment la prévention ». On estime qu’un médecin passe sept minutes par patient.La fin des avances de frais pour les patients ?La Mutualité française est sur la même longueur d’ondes, un rapprochement des tarifs permettrait un retour à terme à des tarifs remboursés par la Sécurité sociale et les mutuelles. Dans un entretien aux Echos, son président, Etienne Caniard préconise une « prise en charge totale par la Sécurité sociale et les complémentaires des actes effectués dans le respect du parcours de soins » et la mise en place du « tiers payant intégral pour les patients, qui n\'auraient plus à faire l\'avance des frais, comme c’est le cas dans un certain nombre de pays européens, notamment en Allemagne. Pour l’instant, Marisol Touraine n’y est pas favorable.